Fédération des Sociétés historiques et archéologiques de
Normandie
Association pour la Restauration du Château de Domfront
Congrès de Domfront
11 au 14 octobre 2023
LES NORMANDS ET L’ARGENT
ORIENTATIONS
DE RECHERCHE
établies par François Neveux
avec la collaboration de Thibault Cardon, Jean-Philippe Cormier,
Jérôme Jambu,
Philippe Lardin,
Yannick Marec, Matthieu de Oliveira
Monnaies
gauloises, normandes et françaises
Compte
du bailliage de Domfront de l’Ascension 1294 (AD Pas-de-Calais)
Le thème choisi pour ce congrès
renvoie d’abord à une image traditionnelle : les Normands sont censés être
« près de leurs sous », qu’ils ne sortent pas facilement ! C’est
une image d’Épinal et, comme toutes les images d’Épinal, une fausse
représentation des habitants de la Normandie ou, en tout cas, en partie fausse.
Elle a cependant été largement véhiculée et popularisée, notamment par la
littérature du xixe
siècle.
En réalité, les Normands ont de
multiples rapports avec l’argent : au cours de ce congrès, nous allons
tenter de les rechercher et de les étudier dans tous les domaines.
L’argent, c’est en premier lieu
la monnaie « sonnante et trébuchante », et surtout les pièces d’or et
d’argent, mais aussi de bronze. Dès la Préhistoire, on peut trouver des trésors
constitués d’objets précieux. Les monnaies proprement dites sont présentes sur
le territoire de la Normandie depuis l’Antiquité. Le premier axe abordé est
donc naturellement celui de la numismatique, aussi bien pour les périodes
antique et médiévale que pour les périodes moderne et contemporaine.
Depuis l’Antiquité
et le Moyen Âge, les habitants de la Normandie sont confrontés au phénomène de
l’inflation, aggravé par les crises frumentaires entraînant une hausse des
prix. Certains Normands réussissent néanmoins à s’enrichir à l’occasion de ces
crises, notamment sous la Régence et pendant la Révolution (spéculation sur les
assignats et achats de Biens nationaux). Pourtant, ces enrichissements rapides
peuvent être suivis par des chutes spectaculaires. On peut se demander, par
exemple, quel a été l’impact de la banqueroute de Law en Normandie. De tout
temps, les Normands ont eu des besoins d’argent et ils se sont adressés successivement
aux Juifs, aux monastères, aux notaires, et enfin aux institutions financières
qui trouvent leur plein épanouissement au xixe
siècle, les banques et les caisses d’épargne.
On retrouve l’argent à travers
les comptabilités (publiques et privées), les prix et les salaires et, bien
entendu, le commerce. Dans tous ces domaines, nous chercherons à déterminer ce
qui est spécifiquement normand à travers les sources locales ou nationales.
Enfin, nous nous intéresserons
aux différences entre la réalité et l’imaginaire. La Normandie comprend
évidemment ses riches et ses pauvres et, d’une manière ou de l’autre, l’argent
y joue un rôle fondamental dans les rapports sociaux comme dans la vie
quotidienne. Certains Normands sont vraiment riches et on pourra le saisir à
travers quelques exemples bien choisis. Ils ont souvent été étudiés, mais aussi
représentés dans les arts et dans la littérature. À cet égard, quelques
célèbres écrivains normands du xixe
siècle pourront nous servir de guide.
Ces orientations s’articulent
autour de quatre axes principaux, pour lesquels les textes et la bibliographie
ont été fournis par six auteurs que je tiens à remercier chaleureusement.
Numismatique (les monnaies
en Normandie)
Moyen Âge (Thibault Cardon)
Périodes moderne et contemporaine
(Jérôme Jambu)
Institutions
financières
Banques et réseaux bancaires en
Normandie (Matthieu de Oliveira)
Les Caisses d’Épargne en Normandie
(Yannick Marec)
Usages
et pratiques
Comptabilités (Jean-Philippe Cormier)
Prix et salaires (Philippe Lardin)
Commerce (Philippe Lardin)
Réalités
et imaginaire de l’argent
Fortunes et avoirs des Normands (Jérôme
Jambu)
Les Normands et l’argent dans la
littérature et les arts (Yannick Marec)
1 - NUMISMATIQUE
(Les
monnaies en Normandie)
A. Moyen Âge
La
numismatique médiévale normande bénéficie d’une belle vitalité depuis plusieurs
décennies. Le classement des émissions monétaires repose désormais sur des
bases solides pour les périodes carolingienne et ducale. La période royale
reste bien connue, et a bénéficié de quelques compléments. La période
mérovingienne reste difficile à aborder, tant pour l’ère du triens (v. 575-675)
que pour celle du denier (v. 675-750), mais des avancées remarquables sont en
cours pour les petits monnayages d’argent francs.
Les trouvailles monétaires sont régulièrement inventoriées,
étudiées et publiées, tant pour les périodes mérovingienne, carolingienne,
viking, ducale que royale. Signalons une monographie particulièrement riche sur
les dépôts monétaires haut-normands médiévaux, celle de Jens Christian
Moesgaard, publiée en 2015. Les études de monnaies de fouilles sont trop
nombreuses pour être listées, mais deux publications s’appuient sur cette
documentation, celles de J. C. Moesgaard en 2019 et celle de Th. Cardon en
2021. En outre, la base de données Nummus du CRAHAM ambitionne d’être un
inventaire permanent des trouvailles monétaires, l’accent étant notamment mis
sur la Normandie.
La circulation monétaire est assez bien connue, excepté pour
la période mérovingienne. La Normandie ducale, après quelques travaux
précurseurs, a bénéficié ces dernières années d’une recherche de grande ampleur,
qui défend notamment l’hypothèse d’un système précoce de renovatio moneta.
La circulation de la période qui s’étend de la fin xiie siècle au xve
siècle a été également bien étudiée, parfois avec un effort de croisement avec
les sources écrites, et on notera l’existence de synthèses assez précises pour
la haute Normandie. En outre, une publication sur les usages des monnaies se
fonde pour une part notable sur des trouvailles monétaires normandes.
En creux se dessinent quelques zones d’ombre de la
numismatique normande, sur lesquelles les efforts pourraient se porter dans les
années à venir :
-
Il en est ainsi du monnayage mérovingien, tant pour la chronologie des frappes
des ateliers normands que pour leur inscription dans un cadre plus large.
-
Les frappes royales des xiiie-début
xive siècles attendent
encore un examen fin des différents d’ateliers, et les productions des ateliers
normands pourraient ainsi être individualisées.
-
Les faciès de circulation monétaire ont été dégagés pour la Haute Normandie,
mais ils demanderaient à être complétés par les données de la Basse Normandie,
mais aussi par un croisement dans l’analyse des différentes strates (or,
argent, billon, méreaux de plomb).
-
Pour ce qui est des trouvailles archéologiques, l’abondance des fouilles
d’habitats ruraux pourrait justifier une étude de l’ensemble de la
documentation, croisée avec les sources historiques, afin de mieux comprendre
les usages de la monnaie au village.
-
Enfin, un effort doit être fait pour faciliter une lecture numismatique des
sources écrites, et notamment des comptabilités. Il faut concevoir des outils
pour mettre en lien des mentions monétaires et des monnaies réelles, afin de
lire plus finement nos sources écrites.
B. Époques
moderne et contemporaine (XVIe-XIXe siècle)
L’histoire
de la monnaie des périodes moderne et contemporaine en Normandie a connu de
longues phases de léthargie et des moments d’intense émulation. Après avoir
retenu de façon limitée l’intérêt des « antiquaires » et érudits du xixe siècle, qui préféraient
regarder du côté des périodes anciennes, elle s’est assoupie durant un siècle.
C’est à l’occasion des Journées numismatiques (JN), organisées par la Société
française de numismatique (SFN) à Cherbourg en 1995, que les problématiques
liées à la fabrication des monnaies, ainsi que l’étude des fonds conservés par
des institutions culturelles, commencèrent à intéresser les numismates : J.-P.
Garnier présentait alors des monnayages originaux produits à Saint-Lô au xviie siècle et J.
Pilet-Lemière révélait le contenu du médaillier de Cherbourg, sans en omettre
les pièces les plus récentes.
Il fallut cependant attendre le
début des années 2000 pour assister à une amplification du mouvement. Un volume
de la revue Trésors monétaires, édité par la BnF, était
exceptionnellement consacré aux « Trésors de l’Ouest », dans lequel J. C.
Moesgaard publiait de nombreuses trouvailles de l’époque moderne réalisées en Haute
Normandie, et même pour la première fois, avec G. Salaün, un dépôt de la guerre
de 1870. L’année suivante, Jérôme Jambu soutenait sa thèse – publiée en 2013 –,
qui tentait de retracer toute l’histoire des deux ateliers monétaires de Basse
Normandie entre le xvie
et le xviiie siècle,
Saint-Lô puis Caen, avec une approche inédite de la circulation monétaire.
Dès lors, la recherche consacrée
à la monnaie normande des Temps modernes battit son plein au cours de la
décennie 2010. En sus des régulières communications publiées dans les deux
revues consacrées – Bulletin de la
Société française de numismatique (BSFN) et Cahiers numismatiques (Cah. num.) – deux grand-messes réunirent les
spécialistes de la question : un colloque de la Société d’études numismatiques
et archéologiques (SENA) à Bayeux en 2010, et des JN de la SFN, au château de
Caen, en 2011. Elles furent l’occasion de poursuivre la présentation de fonds
conservés en Normandie et de continuer à affiner les connaissances sur la
production des ateliers monétaires normands, Rouen compris. Parallèlement, de
nouveaux trésors étaient publiés, notamment pour la période contemporaine
(Tirepied v. 1824, Caen v. 1854, Vire v. 1877). Pour clore cette
riche décennie, P. Lajoye s’attaqua aux « Trésors légendaires » ; de nouveaux
musées publièrent leurs fonds ou les firent inventorier (Fécamp, Le Havre) ;
des pistoles d’or espagnoles découvertes sur la plage de Donville-les-Bains par
le DRASSM et étudiées par la BnF furent déposées au musée de Saint-Lô : ce fut
l’occasion de réaliser un numéro spécial de la Revue de la Manche « autour de la Monnaie de Saint-Lô », qui
semblait terminer un cycle.
Car depuis environ cinq ans en
effet, au contraire de l’étude des monnaies normandes pour les périodes antique
et médiévale (cf. présentation de P.-M. Guihard et Th. Cardon), il semblerait
que les périodes moderne et contemporaine soient de nouveau délaissées. Effet
de mode ou est-ce à dire que tout a été écrit ? Non pas ! Nombreux sont les
trésors qui attendent d’être publiés, dont quelques-uns de papier-monnaie. De
belles pages restent encore également à écrire sur l’utilisation de la monnaie
réelle par les Normands, parent pauvre des études monétaires. Et les études
menées par Ch. Maneuvrier sur les retours d’or de Guinée dans les ports
normands au xvie siècle
promettent un glissement géographique du commerce des métaux destinés à la
production d’espèces précieuses. Gageons que le congrès de la FSHAN à Domfront
sera l’initiateur d’un nouveau souffle !
2 - INSTITUTIONS
FINANCIÈRES
De tout temps, les Normands ont
eu besoin d’« argent frais » pour acquérir des biens ou financer des
projets. Au Moyen Âge, le financement est souvent assuré par les Juifs, seuls
autorisés à pratiquer le prêt à intérêt, jusqu’à leur expulsion générale au xive siècle. Le relais a été
pris par les institutions religieuses, notamment par le biais de la
constitution de rentes. Cette activité, indispensable au bon fonctionnement de
la société, est donc désormais assurée par des « chrétiens ». Au
cours de l’époque moderne, les notaires jouent un rôle de plus en plus
important dans les opérations de prêt, et c’est encore vrai après la
Révolution. De tout temps, les Normands désargentés ont eu recours aux
usuriers, qui prêtaient à des taux très élevés. Il faut attendre les années
1820, pour que soient créés des établissements qui répondent véritablement aux
besoins de financement des Normands, sous deux formes différentes : les
banques et les Caisses d’Épargne.
A.
Banques et réseaux bancaires en Normandie
Longtemps
majoritairement agricole, la Normandie – tant Haute que Basse – s’est
progressivement tournée vers des activités plus diversifiées, selon les cas
commerciales et portuaires, manufacturières puis industrielles. Les principales
villes (Caen, Le Havre, Rouen) ont largement bénéficié de ce processus pour
s’affirmer comme des places incontournables à l’échelle régionale et parfois
nationale, quand d’autres, de moindre importance (comme Alençon, Argentan,
Cherbourg, Dieppe, Fécamp, Flers et d’autres encore), ont endossé à cette
occasion un rôle structurant du plat-pays dont elles s’affirment comme le point
de convergence.
Le
développement territorial des échanges comme le financement des activités
économiques a longtemps reposé sur le recours aux détenteurs locaux de
capitaux, selon les cas notables, notaires voire même prêteurs d’occasion ou
usuriers. Lorsque les besoins se font plus importants ou plus pressants, la
nécessité de faire appel à des intermédiaires plus solides et plus spécialisés
se fait jour.
Des
Caisses, Comptoirs et autres Banques apparaissent alors, selon les cas sur une
base locale, régionale ou nationale, proposant leurs services à une clientèle
géographiquement limitée ou insérée dans des réseaux d’échanges et de
production plus larges.
Cette session du Congrès 2023 de la FSHAN constitue
une belle occasion de s’interroger sur
- le parcours des « manieurs d’argent » et leur
progressive professionnalisation ;
- l’ancienneté et la densité du maillage bancaire en
Normandie en longue durée ;
- la nature juridique des établissements bancaires, selon
les cas mutualistes ou capitalistiques ;
- l’origine – locale ou extra-régionale – des fonds
mobilisés comme des administrateurs des établissements bancaires ;
- le profil social et professionnel de la clientèle et, par
extension, la destination des fonds détenus ou prêtés par les banques normandes ;
- l’ampleur des mouvements d’argent prêtés ou escomptés, en
moyenne et longue durée.
B. Succès et limites de la prévoyance des Caisses d’Épargne
normandes
En Normandie, la
plus ancienne Caisse d’Épargne est celle de Rouen créée sous forme de Société
anonyme par une ordonnance du Roi Louis XVIII datée du 30 mars 1820.
Dès janvier 1822, une institution similaire apparaît au Havre. La majeure
partie des créations datent cependant de la Monarchie de Juillet, l’époque de
Guizot, député de la circonscription de Lisieux et plusieurs fois ministre de
Louis-Philippe, auteur en mars 1834 d’un célèbre « Enrichissez-vous par le
travail et par l’épargne ». Au total, sur les 46 établissements créés dans
les cinq départements normands, 31 le sont entre 1834 (Cherbourg) et 1845
(Flers). Les deux dernières créations datent de 1878 (Saint-Pierre-sur-Dives)
et 1880 (Trouville). Il serait sans doute utile de connaître avec davantage de
précision les modalités des différentes créations.
Il s’agit
d’institutions principalement urbaines même si l’apparition de succursales
permet par la suite de diffuser l’idée d’épargne organisée dans les campagnes
environnantes. En fait on cherche surtout, au moins dans un premier temps, à
promouvoir les bonnes habitudes liées, pense-t-on, au développement de l’idée
de prévoyance parmi les milieux populaires et notamment les ouvriers. En
réalité, la Caisse d’Épargne ne pouvait jouer qu’un rôle, certes non
négligeable mais limité dans la lutte contre l’extension du paupérisme par le
biais du livret de Caisse d’Épargne dont la création est devenue le symbole de
l’institution. Cependant, une étude plus fine des déposants et de la
représentation sociale de l’institution, notamment dans la presse, en
particulier lors des crises politiques et financières, pourrait amener à
nuancer cette appréciation générale. Toutefois, même sous le Second Empire où
l’on observe un développement de l’épargne populaire, cela ne concerne qu’une
partie réduite des catégories les plus modestes de la société. De même, le fort
accroissement des dépôts d’épargne dans les années 1880, observable en
Normandie comme dans l’ensemble national, doit être imputé davantage à l’afflux
de déposants relativement aisés attirés par un intérêt rémunérateur dans une
période de crise des placements plus qu’à l’arrivée en masse de membres des
milieux populaires. Cette évolution a d’ailleurs suscité des critiques contre
la « déviation » du rôle des Caisses d’Épargne de la part de certains
notables. Pour d’autres, en particulier les dirigeants du mouvement socialiste,
l’idée même d’épargne, en régime capitaliste, devait être condamnée.
Ces critiques
n’ont pas empêché la diffusion de l’esprit d’épargne fortement encouragée en
particulier par les responsables politiques et les notables des débuts de la
Troisième République. En 1880, le taux de pénétration du livret de Caisse
d’Épargne est de 13,8 livrets pour cent habitants en Haute Normandie (15,5
en Seine-Inférieure ; 10,1 dans l’Eure). À titre comparatif, le taux de
pénétration est de 7,8 % seulement en Basse Normandie. Ainsi l’épargne est
alors surtout un fait urbain, ce qui mériterait sans doute d’être nuancé.
Cependant, pour
contrebalancer cette réalité, une proposition de loi déposée par le député de
la Manche Legrand a visé à établir des guichets d’épargne là où n’existait
aucune caisse. Cette idée est reprise par le gouvernement dans un projet de loi
daté du 1er juillet 1880 qui envisage la création d’une Caisse
d’Épargne postale s’appuyant sur l’infrastructure des bureaux de poste. La loi
est adoptée le 9 avril 1881. Elle cherche à maintenir une forme
d’équilibre entre les deux réseaux de collecte de l’épargne, en faisant
bénéficier les Caisses d’Épargne ordinaires, qui ne peuvent s’appuyer sur des
structures administratives, d’un écart de taux de 0,50 % destiné à couvrir
leurs frais de gestion. Malgré cet avantage la concurrence de la Caisse
d’Épargne postale risquait d’être particulièrement vive dans les villes
disposant de plusieurs bureaux de poste. De fait, après les quelques années
nécessaires à la mise en place et à la régularisation du fonctionnement de la
caisse postale, le développement de la concurrence entre les deux institutions
paraît réel dans les villes les plus importantes. Au milieu des années 1880, il
y a toujours une prépondérance de la collecte de l’épargne urbaine sur celle
des campagnes, y compris dans le cadre de la Caisse d’Épargne postale.
Toutefois, ce constat, qui concerne principalement la Seine-Inférieure, doit
être nuancé au vu des résultats obtenus par les autres départements normands,
moins urbanisés. En effet, si l’on considère les moyennes générales des
opérations effectuées par les caisses postales, elles apparaissent nettement
meilleures dans les départements ruraux. Ainsi en 1886, le Calvados se situe au
12e rang, l’Orne et la Manche respectivement aux 24e
et 25e rangs, l’Eure au 39e rang alors que la
Seine-Inférieure ne vient qu’en 68e position.
Au total, la
concurrence que pouvait faire la nouvelle forme de collecte de l’épargne aux
anciennes Caisses d’Épargne ordinaires, principalement situées en ville, est
cependant demeurée limitée. Les caisses ordinaires ont continué leur essor en
adoptant leurs horaires d’ouverture des guichets, en développant de nouvelles
formes d’épargne, comme l’épargne scolaire, et en ouvrant des succursales. Le
dynamisme des établissements en la matière a pu donc être fort variable, ce qui
mériterait d’être étudié de plus près. Néanmoins, de manière générale, les Caisses
d’Épargne ordinaires poursuivent leur essor. En témoigne notamment la
construction d’hôtels des Caisses d’Épargnes, véritables temples de l’épargne,
particulièrement durant les années 1860-1900. Ces constructions, souvent
inspirées par l’architecture de l’ère haussmannienne, avec des adaptations
liées aux changements de régimes (apparition d’emblèmes républicains
notamment), consacrent l’institutionnalisation des Caisses d’Épargne, en France
et en Normandie, le « pays de Sapience », comme on la qualifie fréquemment
à l’époque. Il y aurait sans doute une étude à faire du contexte et des
modalités de création de ces « Hôtels de Caisse d’Épargne » et de
leurs éventuelles spécificités normandes avec leurs évolutions dans la longue
durée.
De même,
avec la montée en puissance de la concurrence du système bancaire,
principalement à partir des années 1960, les Caisses d’Épargne normandes ont
été amenées à diversifier leurs activités. Déjà la loi Minjoz de 1950 avait
favorisé la participation des Caisses d’Épargne à la reconstruction du pays, en
leur permettant de consacrer une partie des fonds déposés et de leurs excédents
à des opérations d’intérêt public. Dès lors, le milieu des années 1960 marque
la fin de la monoculture et de l’exclusivité du « Livret A »
avec la création du « Livret Épargne-Logement » puis du « Livret
supplémentaire » ouvert à tous. Cette évolution a été accompagnée par un
processus de rapprochement puis de fusion entre caisses, entrepris
principalement à partir des années 1990, tandis que les Caisses d’Épargne
prenaient le statut de banques coopératives. Après les créations des Caisses d’Épargne
de Basse et Haute-Normandie, la fusion des deux Caisses normandes intervient en
2008. Il s’agit dès lors du principal établissement de banque coopérative
rayonnant sur l’ensemble de la Normandie. Bien évidemment, cette transformation
radicale a pu être perçue différemment selon les localités et aussi la
clientèle et le personnel des anciennes caisses locales.
3 - USAGES ET
PRATIQUES
A. Comptabilités
Quelques généralités
Les premières comptabilités apparaissent au xiiie siècle et elles se
développent à la fin du Moyen Âge. Ce sont des comptabilités publiques émanant
des autorités royales ou seigneuriales. Pour la période moderne, on peut
trouver des comptabilités de l’administration royale dans les riches fonds des
intendances de Rouen, Caen et Alençon (série C des Archives départementales),
mais aussi des comptabilités personnelles dans les livres de raison ou les
journaux intimes. Pour la période contemporaine, les sources publiques sont
toujours très riches, mais l’on peut également consulter plus facilement des
comptabilités privées.
L’ARCD s’est depuis longtemps
intéressée aux comptabilités des comtes d’Artois, princes apanagistes détenant
« la terre de Domfront ». Nous allons donc privilégier cet exemple et
celui des comptabilités médiévales, sous la plume de son président,
Jean-Philippe Cormier.
L’exemple des
comptabilités publiques médiévales (XIIIe-XVe siècle)
Les documents relevant des
comptabilités publiques pour la Normandie médiévale restent rares, surtout pour
les périodes anciennes, antérieures au xive
siècle.
Pour la période des ducs-rois, on
dispose de mandements, d’hommages, de dons, mais rarement de documents
comptables au sens strict, établissant les recettes et les dépenses. Les
registres de la chancellerie du roi Philippe Auguste, à partir de 1204,
recueils de diplômes, chartes et lettres pour plus de la moitié de leur
contenu, majoritairement d’origine royale, sont une bonne source de renseignements.
On y trouve la transcription d’enquêtes faisant état des droits du roi et des
revenus tirés des forêts, des péages, de la justice, des fiefs, des églises et
d’autres recettes domaniales. Certains inventaires ont un caractère fiscal
avéré, notamment ceux consacrés aux revenus forestiers, aux dettes à l’égard
des Juifs, aux recettes domaniales (cens).
Pour la fin du xiiie siècle, puisque le
congrès se tiendra à Domfront, on mentionnera en particulier les huit comptes
établis par les baillis de Robert II d’Artois pour la « terre de
Domfront », en fait un petit bailliage excentré par rapport à l’apanage du
comte, conservés aux Archives du Pas-de-Calais et aux Archives nationales[1].
Les documents se font plus nombreux
par la suite. En 1871, Léopold Delisle publia un
recueil des Actes normands de la Chambre des Comptes sous Philippe de Valois
(1328-1350). On y trouve de nombreux actes comptables, par exemple les Parties
de commune despense de la baillie de Costentin à compter au terme de Pasques
l’an M CCC XXXI (n° 8), les fragments de compte de la baillie
de Rouen à Pâques 1334 (n° 42) ou encore ce fragment d’un compte des
biens qui avaient appartenu à Robert d’Artois en Normandie – 1335 (n° 48),
que l’on peut rapprocher d’une copie partielle des comptes de la vicomté de
Domfront pour les années 1332-1343, faite au xvie
siècle et conservée aux Archives nationales[2].
Les rouages comptables de l’apanage
d’Alençon sont étudiés par Franck Mauger dans sa thèse,
Le dernier apanage. Gouvernement et administration des comtés d’Alençon et
du Perche (1290-1525), Université de Caen Normandie, 2017.
Pour la première moitié du xve siècle, subsistent
quelques rares comptes de vicomté, qui sont de première importance pour
appréhender les comptabilités publiques au niveau local : fragments pour
la vicomté d’Avranches aux termes de Pâques 1410 et 1415[3] ;
copie du xviie siècle
du compte de la Saint-Michel 1431 de la vicomté de Rouen[4] ;
journal des seules recettes pour celle de Valognes aux termes de Pâques et de
la Saint-Michel 1439[5] ;
fragments pour les vicomtés de Montivilliers et Neuchâtel[6] ;
compte de la vicomté de Carentan de 1426[7].
Le compte de Jean
le Muet, vicomte d’Orbec, pour le terme de la Saint-Michel 1444 est fort
heureusement conservé dans son intégralité[8] et publié par Henri de Frondeville[9]. La médiathèque d’Argentan conserve
des comptes de la vicomté d’Exmes (des brouillons ?) pour les années
1445-1447, mais la série n’est pas complète[10].
Une fois encore, la vicomté de
Domfront apparaît privilégiée, puisque subsistent, complets, les comptes de
quatre termes consécutifs remontant au début de l’occupation anglaise, de la
Toussaint 1419 à l’Ascension 1421[11],
auxquels on peut ajouter divers fragments subsistants de comptes des années
1420[12].
Pour l’ensemble de la Normandie,
subsistent les comptes de Pierre Surreau, receveur général de Normandie pour la
période novembre 1423-janvier 1425[13],
la partie consacrée aux seules dépenses de 1424-1426[14],
ainsi que son compte qui couvre la période entre le 1er octobre
1428 jusqu’au 30 septembre 1429[15].
À partir de la deuxième moitié du xve siècle, les sources se
font plus nombreuses. Pour les comptabilités publiques, de nouvelles ressources
se trouvent dans les archives des bureaux de finance des généralités.
B. Prix et salaires
On ne travaille que pour
recevoir l’argent nécessaire à la vie quotidienne. C’est pourquoi l’étude des
salaires est un élément fondamental pour la compréhension de la place de
l’argent dans le fonctionnement d’une société. La première approche,
apparemment la plus simple, consiste à en suivre les évolutions au cours d’une
période donnée. Pourtant, cette étude n’est pas aussi facile qu’il peut le
sembler à première vue, surtout quand on dispose de données supposées fiables,
ce qui n’est pas toujours le cas, en particulier pour les périodes anciennes comme
la fin du Moyen Âge où de nombreuses comptabilités fournissent de multiples
données chiffrées.
En fait, les salaires sont très
souvent composites et ils peuvent comporter une partie en nature qui n’est pas
toujours comptabilisée. Cela peut aller de la fourniture de la nourriture au
logement ou à l’achat de vêtements à certaines occasions selon un rythme fixé
par le contrat d’embauche. L’étude de la part non monétaire des salaires est
donc un aspect important, dont l’évolution peut être révélatrice de celle d’une
société. Il faut évidemment faire la part des salaires urbains et des salaires
ruraux, souvent plus faibles, mais avec des éléments non monétaires longtemps
plus conséquents.
L’essentiel dans une étude des
salaires est de savoir s’ils permettent à ceux qui les reçoivent de vivre
convenablement. L’étude du pouvoir d’achat au cours d’une période fournit bien
des éléments intéressants sur les niveaux de vie. Pourtant, là encore, les
données ne sont pas faciles à utiliser et il faut tenir compte de l’évolution
de la valeur des monnaies. Il a été longtemps habituel de
« déflater » les salaires, c'est-à-dire de les exprimer en quantité
de blé quand le prix de celui-ci est connu. La méthode peut être utile mais de
nouvelles approches seraient souhaitables, car les qualités de blé sont
variables et le poids du pain vendu en période de crise peut diminuer sans que
le prix change. Des recherches aussi détaillées que possibles sur les budgets
seraient donc très bienvenues.
C. Le commerce
Si l’étude du commerce à une
période donnée doit évidemment comporter des éléments concernant les produits
échangés et les principaux courants qui l’animent, l’attention doit avant tout
se porter sur le paiement de ces transactions. C’est en étudiant la répartition
des sommes engagées dans les échanges de marchandises qu’on pourra se faire une
idée des évolutions générales de l’économie et, de ce fait, de l’évolution des
fortunes des marchands. Il serait d’ailleurs intéressant de voir comment les
fortunes accumulées grâce au commerce sont utilisées, en achat de biens
mobiliers ou immobiliers ou de seigneuries permettant d’accéder à la noblesse.
Une étude des alliances matrimoniales de ces familles avec ce qu’elles
contiennent en dot et autres éléments matériels, par exemple dans les affaires,
serait très révélatrice.
Il faut aussi faire la part du
commerce local à caractère « artisanal ». C’est le commerce de tous
les jours pour les salariés et il serait utile, en fonction de sources
chiffrées, de voir quels sont les secteurs qui sont les plus importants :
la viande, le pain, les vêtements, éventuellement les loyers. La part du crédit
est évidemment fondamentale et une présentation des moyens d’emprunter de
l’argent serait d’un grand intérêt. L’étude des procédés utilisés par les
créanciers pour se faire rembourser est aussi très révélatrice et devrait
permettre de repérer des différences selon les milieux : du
rééchelonnement des dettes à la confiscation des biens.
Les méthodes de paiement des échanges commerciaux sont également
un aspect de notre question. Il n’est pas toujours très sûr de faire voyager de
grosses sommes d’argent. C’est pourquoi bien des moyens ont été mis au point
pour éviter les transferts monétaires. Les lettres de change, l’utilisation de
facteurs pour payer sur place des vendeurs, tandis que leurs associés
recevaient sur le lieu d’arrivée l’argent des marchandises, sont des éléments à
analyser de manière concrète et détaillée. Enfin, il faudrait aussi se pencher
sur les monnaies utilisées et sur les problèmes de change.
4 - RÉALITÉS ET IMAGINAIRE DE L’ARGENT
A. Fortunes et avoirs des Normands
Au début de la pandémie
mondiale, en avril 2020, un journaliste américain, qui devait s’ennuyer durant
son confinement, tenta de réaliser le classement des hommes les plus riches de
tous les temps. Tandis que le célèbre John D. Rockefeller montait sur la
troisième marche du podium, Guillaume le Conquérant n’aurait pas eu à rougir de
la septième place qui lui était attribuée, avec plus de 200 milliards de
dollars ! Si l’on doute fortement qu’un tel calcul puisse être réalisé, il
n’empêche que celui qui devint roi d’Angleterre détenait en effet une véritable
fortune. Est-ce à dire que tous les Normands étaient riches ?
La Normandie, c’est certain,
l’était dans son ensemble. Ne fournissait-elle pas Paris en bœufs et en
laitages ? Riche à ce point que fiscalement, depuis la guerre de Cent Ans,
elle était la principale ressource des souverains, comptant pour un quart dans
les recettes de François Ier. On n’oubliera pas cependant que,
si des cadets de la noblesse tentèrent leur aventure ailleurs – comme les
Hauteville en Italie ou Charles Houel et les siens dans les Antilles –, c’était
généralement pour faire fortune. Par ailleurs, la province connut de nombreuses
révoltes antifiscales, dont la plus célèbre est sans doute celle des Nu-pieds.
Pour en savoir plus sur les
avoirs des Normands, et estimer leur niveau de fortune, les historiens des
temps modernes peuvent compter, par exemple, sur les inventaires après-décès.
Souvent utilisés pour la culture matérielle, les études sur la consommation ou
pour la généalogie, c’est dans ce domaine qu’ils mériteraient pourtant d’être
dépouillés de façon sérielle, ce qui n’a guère été fait. En effet, au-delà-des
liquidités qui peuvent y figurer, l’inventaire des papiers permet généralement
de réaliser la balance des dettes passives et actives : en gros, des
avoirs et des dépenses. Tout en songeant que, les Normands, taiseux, étaient
plutôt réputés pour dissimuler leur richesse…
Aucune étude n’a jusqu’à présent
été réalisée sur les « Fortunes et avoirs des Normands ». Tout juste
leur niveau de vie a-t-il été approché[16],
ainsi que le train de vie des institutions villageoises[17].
Des indications, des pistes, ainsi que quelques données précieuses figurent
bien çà et là dans des ouvrages ou des articles sur la production des richesses
agricoles[18],
le foncier[19],
le patrimoine[20],
la thésaurisation de métaux précieux[21],
etc. Mais c’est sans doute insuffisant et la thématique reste en chantier,
offrant de nombreuses opportunités de communications à l’occasion de ce
congrès.
B.
Les Normands et l’argent dans la
littérature et les arts
Quelques
généralités
Au fil des siècles, on trouve en
Normandie de nombreux artistes qui ont abordé, d’une manière ou de l’autre le
thème « Les Normands et l’argent ».
Dans le domaine des arts
plastiques, la Normandie a compté beaucoup de sculpteurs, peintres et maîtres
verriers, dont les œuvres pourraient être envisagées sous cet angle. Pour le
Moyen Âge et la Renaissance, le vitrail et la peinture murale nous fournissent
de nombreuses scènes liées à l’argent. On pourrait étudier, en particulier, le
personnage de saint Éloi, dont l’activité d’orfèvre est souvent mise en valeur.
Pour les périodes suivantes, la
peinture à l’huile, sur bois ou sur toile, paraît la plus à même d’évoquer la
question de l’argent. On pourrait commencer par la peinture religieuse,
illustrée par de nombreux artistes locaux dont les œuvres se trouvent encore
dans les églises normandes. Sans espérer trouver l’équivalent de « La
vocation de saint Matthieu » du Caravage (église Saint-Louis des Français
de Rome), on peut découvrir des œuvres consacrées à ce saint, lié à l’argent en
tant que collecteur d’impôt. Cependant, il faut surtout se tourner vers la
peinture du xixe
siècle, qui représente très fréquemment des membres de la classe supérieure,
celle qui détient la richesse. Certains peintres normands montrent bien la
réalité de leur temps, comme le Honfleurais Eugène Boudin (1824-1898).
Cependant, la Normandie a été abondamment visitée et peinte par des artistes
parisiens, dont les plus célèbres sont les impressionnistes, guidés par leur
chef de file, Claude Monet (1840-1926). Ces peintres montrent en détail les
costumes de leurs contemporains normands, et surtout les robes des femmes de la
bonne société, souvent ornées d’onéreuses dentelles, de Bayeux et d’Alençon
notamment.
C’est toutefois le domaine de la littérature qui apparaît comme le plus
prometteur. Des écrivains parisiens sont venus en Normandie et en ont décrit
sans complaisance la société « provinciale », comme Honoré de Balzac (1799-1850).
Ce dernier a visité Bayeux et Alençon et en a tiré des romans, la Femme
abandonnée et La Vieille fille. La Normandie a aussi généré ses
propres auteurs, comme Gustave Flaubert (1821-1880), Guy de Maupassant
(1850-1893) ou Octave Mirbeau (1848-1917). Les uns et les autres étaient des
bourgeois, et pourtant ils ont croqué sans pitié les hommes et les femmes
appartenant à leur milieu social. À
cet égard nous pouvons insister sur l’exemple le plus caractéristique, celui de
Flaubert, ici présenté par Yannick Marec.
Un exemple : Flaubert, la Normandie et l’argent
Le xixe siècle
est marqué par la montée en puissance de l’économie capitaliste avec notamment
le développement de la Bourse et le rôle accru des banques qui supplantent les
rouages traditionnels des réseaux financiers, les négociants et les notaires,
voire les usuriers sans pour autant les faire disparaître totalement.
Dans ce contexte, l’affirmation du rôle de l’argent dans les relations
sociales a pu être mise en cause voire condamnée par certains auteurs attachés
à l’art pour l’art et refusant la marchandisation de la vie littéraire.
C’est ce que l’on peut percevoir, de manière à la fois explicite mais
aussi paradoxale chez Flaubert. Celui-ci est assurément un héritier dont le
père, chirurgien chef de l’Hôtel-Dieu de Rouen possédait au moment de son décès
en 1846 une fortune qui représentait l’une des cinq principales successions
rouennaises de l’année. Son épouse a su faire fructifier le patrimoine familial
en agrandissant de manière significative, le total de ses biens propres jusqu’à
son décès en 1872. Cependant, Madame Flaubert, qui se méfiait du comportement
dépensier de son fils cadet, ne lui a pas permis de percevoir directement le
capital auquel il aurait pu avoir droit après le décès de son père. Il n’en
touchait qu’une rente annuelle.
Par ailleurs, après le décès de sa mère, Flaubert a dû vendre une bonne
partie de ses biens pour faire face à la ruine de son neveu par alliance,
Commanville, propriétaire d’une scierie et négociant en bois. À la fin des années 1870, malgré ses réticences,
Flaubert doit accepter, pour pouvoir subsister, une place de conservateur
adjoint hors cadre à la bibliothèque Mazarine de Paris, une solution trouvée
par son entourage amical.
C’était donc bien un héritier rouennais mais un héritier qui ne
disposait pas de l’intégralité de son héritage et qui était constamment à la
recherche d’argent.
Il existe chez Flaubert une forte dénonciation du rôle de l’argent dans
la société de son temps. À l’occasion d’un dîner chez la princesse Mathilde
recevant plusieurs médecins, il aurait ainsi dénoncé la caste des médecins
attirés par l’argent, en exceptant toutefois son père qui acceptait de dépenser
« 200 Fr. de frais de poste pour aller faire dans quelque coin du
département, une opération à une poissonnière, qui le payait avec une douzaine
de harengs »[22].
De manière plus explicite encore, il écrit à son ami Tourguéniev, en
juin 1872, qu’il préfère se laisser dépouiller plutôt que de se défendre « non
par désintéressement, mais par ennui, par lassitude. Quand il s’agit de matière
d’argent, il me prend comme une rage de dégoût qui touche à la démence ».
Il y a surtout chez Flaubert une volonté d’opposer l’argent à l’art.
Selon lui, l’artiste doit travailler avec un désintéressement total, qui
dépasse même le seul souci de gain financier : « On n’a rien pour se
soutenir rien, oui rien, c’est-à-dire aucun espoir d’argent, aucun espoir de
célébrité, ni même d’immortalité », écrit-il à Louise Colet en 1852.
Flaubert s’indigne aussi des préoccupations d’argent qui
transparaissent dans la correspondance de Balzac. Bien plus, il dénonce la
montée du rôle de l’argent dans la société de son temps, sans se faire
d’illusions sur l’avenir : « Je me demande si dans quelque temps il
sera possible de vivre sans s’occuper d’argent, sans être banquier, sans vendre
ou acheter n’importe quoi. – Jolie perspective pour l’humanité ! – Tous
épiciers ! »
La question de l’argent sous-tend bien des aspects de l’œuvre de
Flaubert. Dans Madame Bovary, il
s’attache à décrire une société où les relations sont fortement conditionnées
par les questions d’argent, et notamment le rôle de la rente, à une époque que
l’on peut situer sous la Monarchie de Juillet (1830-1848), au temps du « roi-bourgeois »
Louis-Philippe.
Les banques de dépôt n’existaient pas encore en France et ce sont les
notaires et différents intermédiaires plus ou moins usuriers qui servaient de
gestionnaires des fortunes. Ainsi les intrigues d’argent combinées au caractère
dépensier d’Emma Bovary ‒ dont profite en
particulier le marchand d’étoffe Lheureux ‒
la conduisent au suicide. La chute finale et le désastre financier font que
Berthe, la fille d’Emma et de Charles qui est mort de chagrin, est condamnée au
sort d’une ouvrière d’usine. L’écrivain s’est aussi renseigné sur les
opérations financières de son époque, ce qui atteste de son souci de réalisme.
Il prend aussi en compte les nouvelles formes d’encouragement à l’épargne par
le biais notamment d’un mouvement de création de Caisses d’Épargne, qui se
manifeste dès les années 1820 et qui s’affirme particulièrement en Normandie
sous la Monarchie de Juillet. Flaubert fait ainsi de nombreuses allusions à la Caisse
d’Épargne dans Madame Bovary lorsqu’il
évoque les espérances de l’officier de santé Charles Bovary : « Il
réfléchissait. Il pensait à louer une petite ferme aux environs, et qu’il
surveillerait lui-même, tous les matins, en allant voir ses malades. Il en
économiserait le revenu, il le placerait à la Caisse d’Épargne ». Notons,
cependant, le scepticisme de l’écrivain par rapport à l’institution de
prévoyance. Au mot « Épargne » (Caisse
d’) du Dictionnaire des idées reçues,
il la qualifie d’« occasion de vol pour les domestiques », semblant
reprendre une des idées convenues de son temps. Ce thème, il est vrai, apparaît
dans différents ouvrages de cette époque, notamment dans celui de De Lérue,
Maîtres et domestiques (Rouen, 1862).
Dans L’éducation sentimentale, le souci de réalisme est également
très présent, en ce qui concerne les allusions à l’argent. Ceci peut d’ailleurs
dérouter quelque peu le lecteur d’aujourd’hui, peu coutumier des pratiques du xixe siècle et des sommes
évoquées, avec des dénominations anciennes souvent mêlées et devenues peu
compréhensibles. Il est ainsi question aussi bien de Napoléons que de Louis,
d’écus, de livres, de sols et de francs. Surtout, l’argent joue un rôle
déterminant dans la construction du récit avec, par exemple, les effets
supposés ou réels de l’héritage de Frédéric, le personnage principal. De même,
la fin du roman est marquée par les problèmes d’argent qui conduisent Frédéric
à la rupture avec Madame Arnoux et Madame d’Ambreuse.
Les exemples pourraient être multipliés et traduisent une forme
d’obsession par rapport aux questions d’argent que Flaubert vivait lui-même, si
l’on en croit la prégnance de ces thèmes dans sa correspondance. Ainsi
l’édition électronique de sa correspondance retient 414 lettres faisant
allusion au thème de l’argent.
En conclusion, on peut percevoir combien la question de l’argent est
présente chez Flaubert. Cela s’est traduit chez l’écrivain normand par la défense
résolue de l’art pour l’art, en dépit des contingences matérielles pourtant
très présentes et de la montée en puissance du rôle de l’argent dans la société
de son temps.
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Haute-Normandie, Rouen, CEHN et imprimerie Bertout, Luneray, 1995.
Coninck Séverine de, Le
livret de Caisse d’Épargne (1818-2008). Une « passion française »,
Paris, Economica, 2012, 409 p.
Feiertag Olivier, « La bancarisation de la société française dans
les années 1968 » dans Alya Aglan, Olivier Feiertag, Yannick Marec (dir.), op.
cit., p. 163-175.
Gueslin André, « L’invention des Caisses d’épargne en
France : une grande utopie libérale », Revue Historique, 1989,
n° 2, p. 391-409.
‒,
« Aux origines de l’État-Providence : la mise en place du modèle
français des Caisses d’épargne », Revue
d’Histoire moderne et contemporaine, avril-juin, 1991, p 231-249.
‒,
Mythologies de l’argent. Essai sur
l’histoire des représentations de la richesse et de la pauvreté dans la France
contemporaine, Paris, Economica, 2007.
Largesse Pierre, « La première Caisse d’Épargne d’Elbeuf
(1836-1848) », Bulletin de la
société de l’Histoire d’Elbeuf, n° 15, juillet 1991.
Leveau-Fernandez Madeleine, Hôtels de Caisse
d’Épargne, Paris, les Éditions de l’épargne, 1994, 208 p.
Marec Y., Daviet J.-P.,
Garnier B., Laspougeas J., Quellien J., La
Normandie au XIXe siècle. Entre tradition et modernité, Editions
Ouest-France, 2015, 606 p.
Marec Yannick et Tournié Vincent
(avec Laure de Llamby et Antoine Parrad)
La Caisse d’Épargne Normandie. Une Histoire pour demain, Éditions des
Falaises, 2020, 239 p.
Mémoire de la protection sociale en Normandie, n° 15, années
2019-2020, Dossier d’Études « Histoire des Caisses d’épargne en Normandie
(1820-2020) » (contributions de Yannick Marec et Vincent Tournié, p
53-148).
Michalet Charles-Albert, Les
placements des épargnants français de 1815 à nos jours, Paris, PUF, 1968,
412 p.
Tournié Vincent, Épargne et
crises politiques en France. Les mouvements de panique dans les Caisses
d’épargne au XXe siècle, Paris, Economica, 2011, 336 p.
3 - USAGES ET PRATIQUES
A. Comptabilités (médiévales)
Le
Domfrontais médiéval, numéros 1 à 26.
Cormier Jean-Philippe, « Fragments de
comptes de la vicomté de Domfront sous l’occupation anglaise (années
1420) », Le Domfrontais médiéval 22, 2012-2013, p. 35-63.
‒,
« Documents domfrontais de Robert II d’Artois », Le Domfrontais
médiéval, 25, 2018-2019, p. 43-72.
Delisle Léopold, Actes normands de la Chambre des Comptes sous
Philippe de Valois (1328-1350), Rouen, Le Brument, 442 p.
Dupont André, « Pour ou contre le roi
d’Angleterre », Bulletin de la Société des Antiquaires de Normandie,
t. 54, 1957-1958, p. 148 et sv.
Frondeville Henri de, La Vicomté d'Orbec pendant l'occupation anglaise
(1417-1449) : Compte de Jean Le Muet, vicomte d'Orbec, pour la
Saint-Michel 1444, Études lexoviennes, t. IV, Caen, 1936.
Mauger Franck Le dernier apanage. Gouvernement et
administration des comtés d’Alençon et du Perche (1290-1525), Thèse de
doctorat sous la direction de F. Neveux, Université de Caen Normandie,
2017.
Milet A., « Comptabilité publique sous la domination
anglaise au XVe siècle : comptes de la vicomté de Neufchâtel,
1443 et 1456 », S.H.N., Mélanges : documents, t. VII, Rouen,
1907, p.195-221.
B. Prix et salaires
Bois Guy, Crise du féodalisme. Économie rurale et démographie
en Normandie orientale du début du XIVe siècle au milieu du XVIe
siècle, Presses de l’EHESS, 1974.
Margairaz Michel et Pigenet Michel, Le prix du travail. France et espaces
coloniaux. XIXe-XXe siècles, Paris, Éditions de la
Sorbonne, 2019.
Sauvy Alfred et, Depoid
Pierre, Salaires et pouvoir d’achat des salariés et des fonctionnaires entre
les deux guerres, Paris, Institut national du travail et d’orientation
professionnelle, 1940.
Sosson Jean-Pierre, Thiry
Claude, Thonon Sandrine, Van Hemelrych Tania, Les niveaux de
vie au Moyen Âge. Mesures, perceptions et représentations,
Louvain-la-Neuve, Academia Bruylant, 1999.
C. Le commerce
Cailleux Philippe, Trois paroisses de
Rouen : Saint-Lô, Notre Dame la Ronde et Saint-Herbland. XIIIe-XVe
siècle, Rouen / Caen, Pôle universitaire normand, Presses Universitaires de
Caen, 2011.
Mollat du Jourdin Michel, Le commerce maritime normand
à la fin du Moyen Âge. Étude d’histoire économique et sociale, Paris, Plon,
1952.
4 - RÉALITÉS ET
IMAGINAIRE DE L’ARGENT
A. Fortunes et
avoirs des Normands
Béaur Gérard, « Le marché foncier en
Basse-Normandie à la fin de l’Ancien Régime. Domfront, Livarot et Sées autour
de 1780 », Enquêtes rurales, 2 : Paysages ruraux
et société en France septentrionale, Caen, PUC, 1997, p. 71-86.
Boudjaaba Fabrice,
« Femmes, patrimoine et marché foncier dans la région de Vernon
(1760-1830) », Histoires et société rurales, 28, 2007/2, p. 33-66.
Dickinson John, « Niveaux de vie des paysans normands et québécois au XVIIIe
siècle », Famille, économie, et
société rurale en contexte d’urbanisation (XVIIe-XXe
siècle), Actes du colloque d'Histoire comparée Québec-France tenu à
Montréal en février 1990, Chicoutimi, SOREP / Paris, EHESS, 1990,
p. 213-224.
Dumas Françoise et Monard Raymond, « L’argent caché par Pierre Leclert en 1420 (trésor de
Lessay) », RN 1978, p. 131-156 + pl. XIX-XXIII.
Follain Antoine,
« Une comptabilité villageoise normande du XVIe siècle », Histoire et sociétés rurales,
6, 2nd semestre 1996, p. 127-142.
Foisil Madeleine, La Révolte des nu-pieds et les révoltes
normandes de 1639, Paris, PUF, 1970.
Garnier Bernard,
« Des bœufs pour Paris : commercialisation et élevage en
Basse-Normandie (1700-1900), Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest
106/1, 1999, p. 101-120.
Jambu Jérôme,
« Thésauriser dans les campagnes à l’époque moderne : premières
considérations », L’Épargne sous l’Ancien Régime,
Paris, APHE, 2004, p. 63-71
‒, Tant d’or
que d’argent. La monnaie en Normandie à l’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècle), Rennes,
PUR, 2013.
Lemonnier-Lesage Virginie, « La gestion du patrimoine des époux normands à la fin du XVe
siècle : l’éclairage du tabellionage de Bellencombre », Tabularia
[En ligne], Richesse du tabellionage normand au Moyen Âge, 2020.
Moesgaard Jens Christian, « Bourses perdues ? Quelques petits trésors de la
Seine-Maritime (XVIIe-XVIIIe siècles) », BSFN, janvier 1994, p. 723-726.
Poncet Fabrice, Plus
de beurre que de pain ? La spécialisation agricole en Normandie (XVe-XIXe
siècles), thèse de doctorat, Université de Caen, 2015.
B. Les Normands et l’argent dans la
littérature et les arts
Flaubert et
l’argent
Chaline Jean-Pierre, « Flaubert, un
bourgeois de Rouen ? » Études normandes, n° 19,
septembre-novembre 2021, Flaubert et la Normandie, p. 6-11.
– ,
« Flaubert, bourgeois malgré lui ? », Journée d’études. Hommage à
Flaubert. Bicentenaire de sa naissance en 1821. Académie des Sciences,
Belles-Lettres et Arts de Rouen, 2022, p. 27-33.
Fauvel Daniel et Hangard
Hubert, Fortune et infortune des Flaubert, 3 t. Wooz éditions, 2018-2020.
–,
« Les propriétés des Flaubert en Normandie », Études normandes,
n° 19, septembre-novembre 2021, Flaubert et la Normandie,
p. 13-20.
Marec Yannick, « Gustave Flaubert : un héritier rouennais du
XIXe siècle ? » Bulletin Flaubert-Maupassant, n° 27
(dossier « Les Flaubert et l’argent ») 2012, p 7-22
–,
(avec Gisèle Séginger), entrée
« Argent » du Dictionnaire Flaubert, sous la direction de
Gisèle Séginger, Paris Champion, 2017, p 94-98.
–,
« L’argent dans les sociétés française et russe du XIXe siècle
d’après Gustave Flaubert (1821-1880) et Ivan Tourgueniev (1818-1883) »,
Colloque La vie socio-culturelle de l’Europe et de la Russie vue par des
intellectuels du XIXe siècle, Orel, Russie, 29-30 octobre 2018,
Université d’État d’Orel Tourgueniev, 2020 p 24-31.
Robert Joëlle, « Madame Bovary et l’argent », Bulletin
Flaubert-Maupassant, n° 27, (dossier « Les Flaubert et
l’argent »), 2012 p 117-128.
[1] J.-Ph. Cormier, Le Domfrontais médiéval, 25, 2018-2019, p.
43-72.
[2] Archives Nationales (AN), J 780.
[3] Bibliothèque nationale de France
(BnF) fr., 26045, n° 5899-5900 ; fr. 26041, n° 5022-5029.
[4] Archives départementales de
Seine-Maritime, J 759.
[5]
BnF, Nv acq fr. 20929.
[6]
A. Milet, 1907.
[7] A. Dupont,
1957-1958, p. 148 et sv.
[8] BnF fr. 8769
[9] Études lexoviennes, t. IV,
Caen, 1936.
[10] Médiathèque d’Argentan,
Ms. 17.
[11] British Library. Add. Ms. 21364,
édité dans Le Domfrontais médiéval, n° 5, 1987, au n° 23,
2014-2015.
[12] J.-Ph. Cormier,
2012-2013.
[13]
BnF fr. 4485.
[14]
BnF fr. 4491.
[15] BnF fr. 4488.
[16] Dickinson
1990.
[17] Follain 1996.
[18] Garnier 1999 ; Poncet 2015.
[19] Béaur
1997.
[20] Boudjaaba
2007 ; Lemonnier-Lesage
2020.
[21] Dumas,
Monard 1978 ; Moesgaard 1994 ;
Jambu 2004 et 2013.
[22] Journal des Goncourt. Mémoires
de la vie littéraire, t. V, mercredi 28 janvier 1874.
°°°°°°°°°°°°°
58e Congrès des Sociétés historiques et archéologiques de
Normandie
À DOMFRONT, du 11 au 14 octobre 2023.
LES NORMANDS ET L’ARGENT
Proposition de
communication
Les propositions de communication seront examinées au
printemps 2023 (pour une réponse mi-avril) par le comité scientifique du
congrès qui retiendra en priorité les travaux les plus innovants par leur
problématique ou leurs sources et ceux qui s’inscrivent le mieux dans le thème
tel qu’il est défini par les orientations de recherche indiquées dans la
circulaire d’annonce.
La durée des communications ne doit pas
excéder vingt minutes.
Un vidéoprojecteur
sera à la disposition des orateurs (prévoir une clef USB à enregistrer avant la
séance). Les auteurs s’engagent à présenter leur communication à l’horaire
défini par les organisateurs. Ils demeurent propriétaires de leur texte, mais réservent,
à titre gracieux, la priorité de sa publication aux actes du congrès. Ils
recevront après le congrès les consignes de présentation de leur texte écrit,
dont la longueur sera de l’ordre de 25 000 à 35 000 signes (caractères+espaces)
selon le nombre de communications retenues.
À retourner avant le 27 mars 2023
(délai de rigueur) à secretaire@fshan.fr ou fshan@laposte.net
NOM :
Prénom :
Adresse :
Téléphone : Courriel :
Société adhérente
à la FSHAN ou organisme :
propose de
présenter une communication sur le thème suivant :
Titre :
RÉSUMÉ (une vingtaine de lignes) :
PRINCIPALES SOURCES
UTILISÉES :