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mercredi 18 janvier 2023

Congrès de la FSHAN à Domfront du 11 au 14 octobre 2023, orientations de recherche

 

 

 

Fédération des Sociétés historiques et archéologiques de Normandie

Association pour la Restauration du Château de Domfront

 

Congrès de Domfront

11 au 14 octobre 2023

 

 

LES NORMANDS ET L’ARGENT

 

 

ORIENTATIONS DE RECHERCHE

 

 

établies par François Neveux

avec la collaboration de Thibault Cardon, Jean-Philippe Cormier, Jérôme Jambu,

Philippe Lardin, Yannick Marec, Matthieu de Oliveira




Monnaies gauloises, normandes et françaises

Compte du bailliage de Domfront de l’Ascension 1294 (AD Pas-de-Calais)

 

Le thème choisi pour ce congrès renvoie d’abord à une image traditionnelle : les Normands sont censés être « près de leurs sous », qu’ils ne sortent pas facilement ! C’est une image d’Épinal et, comme toutes les images d’Épinal, une fausse représentation des habitants de la Normandie ou, en tout cas, en partie fausse. Elle a cependant été largement véhiculée et popularisée, notamment par la littérature du xixe siècle.

En réalité, les Normands ont de multiples rapports avec l’argent : au cours de ce congrès, nous allons tenter de les rechercher et de les étudier dans tous les domaines.

L’argent, c’est en premier lieu la monnaie « sonnante et trébuchante », et surtout les pièces d’or et d’argent, mais aussi de bronze. Dès la Préhistoire, on peut trouver des trésors constitués d’objets précieux. Les monnaies proprement dites sont présentes sur le territoire de la Normandie depuis l’Antiquité. Le premier axe abordé est donc naturellement celui de la numismatique, aussi bien pour les périodes antique et médiévale que pour les périodes moderne et contemporaine.

            Depuis l’Antiquité et le Moyen Âge, les habitants de la Normandie sont confrontés au phénomène de l’inflation, aggravé par les crises frumentaires entraînant une hausse des prix. Certains Normands réussissent néanmoins à s’enrichir à l’occasion de ces crises, notamment sous la Régence et pendant la Révolution (spéculation sur les assignats et achats de Biens nationaux). Pourtant, ces enrichissements rapides peuvent être suivis par des chutes spectaculaires. On peut se demander, par exemple, quel a été l’impact de la banqueroute de Law en Normandie. De tout temps, les Normands ont eu des besoins d’argent et ils se sont adressés successivement aux Juifs, aux monastères, aux notaires, et enfin aux institutions financières qui trouvent leur plein épanouissement au xixe siècle, les banques et les caisses d’épargne.

On retrouve l’argent à travers les comptabilités (publiques et privées), les prix et les salaires et, bien entendu, le commerce. Dans tous ces domaines, nous chercherons à déterminer ce qui est spécifiquement normand à travers les sources locales ou nationales.

Enfin, nous nous intéresserons aux différences entre la réalité et l’imaginaire. La Normandie comprend évidemment ses riches et ses pauvres et, d’une manière ou de l’autre, l’argent y joue un rôle fondamental dans les rapports sociaux comme dans la vie quotidienne. Certains Normands sont vraiment riches et on pourra le saisir à travers quelques exemples bien choisis. Ils ont souvent été étudiés, mais aussi représentés dans les arts et dans la littérature. À cet égard, quelques célèbres écrivains normands du xixe siècle pourront nous servir de guide.

Ces orientations s’articulent autour de quatre axes principaux, pour lesquels les textes et la bibliographie ont été fournis par six auteurs que je tiens à remercier chaleureusement.

 

Numismatique (les monnaies en Normandie)

Moyen Âge (Thibault Cardon)

Périodes moderne et contemporaine (Jérôme Jambu)

Institutions financières

Banques et réseaux bancaires en Normandie (Matthieu de Oliveira)

Les Caisses d’Épargne en Normandie (Yannick Marec)

Usages et pratiques

Comptabilités (Jean-Philippe Cormier)

Prix et salaires (Philippe Lardin)

Commerce (Philippe Lardin)

Réalités et imaginaire de l’argent

Fortunes et avoirs des Normands (Jérôme Jambu)

Les Normands et l’argent dans la littérature et les arts (Yannick Marec)

 

 

 

 

 

1 - NUMISMATIQUE (Les monnaies en Normandie)

A. Moyen Âge

La numismatique médiévale normande bénéficie d’une belle vitalité depuis plusieurs décennies. Le classement des émissions monétaires repose désormais sur des bases solides pour les périodes carolingienne et ducale. La période royale reste bien connue, et a bénéficié de quelques compléments. La période mérovingienne reste difficile à aborder, tant pour l’ère du triens (v. 575-675) que pour celle du denier (v. 675-750), mais des avancées remarquables sont en cours pour les petits monnayages d’argent francs.

Les trouvailles monétaires sont régulièrement inventoriées, étudiées et publiées, tant pour les périodes mérovingienne, carolingienne, viking, ducale que royale. Signalons une monographie particulièrement riche sur les dépôts monétaires haut-normands médiévaux, celle de Jens Christian Moesgaard, publiée en 2015. Les études de monnaies de fouilles sont trop nombreuses pour être listées, mais deux publications s’appuient sur cette documentation, celles de J. C. Moesgaard en 2019 et celle de Th. Cardon en 2021. En outre, la base de données Nummus du CRAHAM ambitionne d’être un inventaire permanent des trouvailles monétaires, l’accent étant notamment mis sur la Normandie.

La circulation monétaire est assez bien connue, excepté pour la période mérovingienne. La Normandie ducale, après quelques travaux précurseurs, a bénéficié ces dernières années d’une recherche de grande ampleur, qui défend notamment l’hypothèse d’un système précoce de renovatio moneta. La circulation de la période qui s’étend de la fin xiie siècle au xve siècle a été également bien étudiée, parfois avec un effort de croisement avec les sources écrites, et on notera l’existence de synthèses assez précises pour la haute Normandie. En outre, une publication sur les usages des monnaies se fonde pour une part notable sur des trouvailles monétaires normandes.

En creux se dessinent quelques zones d’ombre de la numismatique normande, sur lesquelles les efforts pourraient se porter dans les années à venir :

- Il en est ainsi du monnayage mérovingien, tant pour la chronologie des frappes des ateliers normands que pour leur inscription dans un cadre plus large.

- Les frappes royales des xiiie-début xive siècles attendent encore un examen fin des différents d’ateliers, et les productions des ateliers normands pourraient ainsi être individualisées.

- Les faciès de circulation monétaire ont été dégagés pour la Haute Normandie, mais ils demanderaient à être complétés par les données de la Basse Normandie, mais aussi par un croisement dans l’analyse des différentes strates (or, argent, billon, méreaux de plomb).

- Pour ce qui est des trouvailles archéologiques, l’abondance des fouilles d’habitats ruraux pourrait justifier une étude de l’ensemble de la documentation, croisée avec les sources historiques, afin de mieux comprendre les usages de la monnaie au village.

- Enfin, un effort doit être fait pour faciliter une lecture numismatique des sources écrites, et notamment des comptabilités. Il faut concevoir des outils pour mettre en lien des mentions monétaires et des monnaies réelles, afin de lire plus finement nos sources écrites.

 

B. Époques moderne et contemporaine (XVIe-XIXe siècle)

L’histoire de la monnaie des périodes moderne et contemporaine en Normandie a connu de longues phases de léthargie et des moments d’intense émulation. Après avoir retenu de façon limitée l’intérêt des « antiquaires » et érudits du xixe siècle, qui préféraient regarder du côté des périodes anciennes, elle s’est assoupie durant un siècle. C’est à l’occasion des Journées numismatiques (JN), organisées par la Société française de numismatique (SFN) à Cherbourg en 1995, que les problématiques liées à la fabrication des monnaies, ainsi que l’étude des fonds conservés par des institutions culturelles, commencèrent à intéresser les numismates : J.-P. Garnier présentait alors des monnayages originaux produits à Saint-Lô au xviie siècle et J. Pilet-Lemière révélait le contenu du médaillier de Cherbourg, sans en omettre les pièces les plus récentes.

 

Il fallut cependant attendre le début des années 2000 pour assister à une amplification du mouvement. Un volume de la revue Trésors monétaires, édité par la BnF, était exceptionnellement consacré aux « Trésors de l’Ouest », dans lequel J. C. Moesgaard publiait de nombreuses trouvailles de l’époque moderne réalisées en Haute Normandie, et même pour la première fois, avec G. Salaün, un dépôt de la guerre de 1870. L’année suivante, Jérôme Jambu soutenait sa thèse – publiée en 2013 –, qui tentait de retracer toute l’histoire des deux ateliers monétaires de Basse Normandie entre le xvie et le xviiie siècle, Saint-Lô puis Caen, avec une approche inédite de la circulation monétaire.

Dès lors, la recherche consacrée à la monnaie normande des Temps modernes battit son plein au cours de la décennie 2010. En sus des régulières communications publiées dans les deux revues consacrées – Bulletin de la Société française de numismatique (BSFN) et Cahiers numismatiques (Cah. num.) – deux grand-messes réunirent les spécialistes de la question : un colloque de la Société d’études numismatiques et archéologiques (SENA) à Bayeux en 2010, et des JN de la SFN, au château de Caen, en 2011. Elles furent l’occasion de poursuivre la présentation de fonds conservés en Normandie et de continuer à affiner les connaissances sur la production des ateliers monétaires normands, Rouen compris. Parallèlement, de nouveaux trésors étaient publiés, notamment pour la période contemporaine (Tirepied v. 1824, Caen v. 1854, Vire v. 1877). Pour clore cette riche décennie, P. Lajoye s’attaqua aux « Trésors légendaires » ; de nouveaux musées publièrent leurs fonds ou les firent inventorier (Fécamp, Le Havre) ; des pistoles d’or espagnoles découvertes sur la plage de Donville-les-Bains par le DRASSM et étudiées par la BnF furent déposées au musée de Saint-Lô : ce fut l’occasion de réaliser un numéro spécial de la Revue de la Manche « autour de la Monnaie de Saint-Lô », qui semblait terminer un cycle.

Car depuis environ cinq ans en effet, au contraire de l’étude des monnaies normandes pour les périodes antique et médiévale (cf. présentation de P.-M. Guihard et Th. Cardon), il semblerait que les périodes moderne et contemporaine soient de nouveau délaissées. Effet de mode ou est-ce à dire que tout a été écrit ? Non pas ! Nombreux sont les trésors qui attendent d’être publiés, dont quelques-uns de papier-monnaie. De belles pages restent encore également à écrire sur l’utilisation de la monnaie réelle par les Normands, parent pauvre des études monétaires. Et les études menées par Ch. Maneuvrier sur les retours d’or de Guinée dans les ports normands au xvie siècle promettent un glissement géographique du commerce des métaux destinés à la production d’espèces précieuses. Gageons que le congrès de la FSHAN à Domfront sera l’initiateur d’un nouveau souffle !

 

 

2 - INSTITUTIONS FINANCIÈRES

De tout temps, les Normands ont eu besoin d’« argent frais » pour acquérir des biens ou financer des projets. Au Moyen Âge, le financement est souvent assuré par les Juifs, seuls autorisés à pratiquer le prêt à intérêt, jusqu’à leur expulsion générale au xive siècle. Le relais a été pris par les institutions religieuses, notamment par le biais de la constitution de rentes. Cette activité, indispensable au bon fonctionnement de la société, est donc désormais assurée par des « chrétiens ». Au cours de l’époque moderne, les notaires jouent un rôle de plus en plus important dans les opérations de prêt, et c’est encore vrai après la Révolution. De tout temps, les Normands désargentés ont eu recours aux usuriers, qui prêtaient à des taux très élevés. Il faut attendre les années 1820, pour que soient créés des établissements qui répondent véritablement aux besoins de financement des Normands, sous deux formes différentes : les banques et les Caisses d’Épargne.

A. Banques et réseaux bancaires en Normandie

Longtemps majoritairement agricole, la Normandie – tant Haute que Basse – s’est progressivement tournée vers des activités plus diversifiées, selon les cas commerciales et portuaires, manufacturières puis industrielles. Les principales villes (Caen, Le Havre, Rouen) ont largement bénéficié de ce processus pour s’affirmer comme des places incontournables à l’échelle régionale et parfois nationale, quand d’autres, de moindre importance (comme Alençon, Argentan, Cherbourg, Dieppe, Fécamp, Flers et d’autres encore), ont endossé à cette occasion un rôle structurant du plat-pays dont elles s’affirment comme le point de convergence.

Le développement territorial des échanges comme le financement des activités économiques a longtemps reposé sur le recours aux détenteurs locaux de capitaux, selon les cas notables, notaires voire même prêteurs d’occasion ou usuriers. Lorsque les besoins se font plus importants ou plus pressants, la nécessité de faire appel à des intermédiaires plus solides et plus spécialisés se fait jour.

Des Caisses, Comptoirs et autres Banques apparaissent alors, selon les cas sur une base locale, régionale ou nationale, proposant leurs services à une clientèle géographiquement limitée ou insérée dans des réseaux d’échanges et de production plus larges.

Cette session du Congrès 2023 de la FSHAN constitue une belle occasion de s’interroger sur

- le parcours des « manieurs d’argent » et leur progressive professionnalisation ;

- l’ancienneté et la densité du maillage bancaire en Normandie en longue durée ;

- la nature juridique des établissements bancaires, selon les cas mutualistes ou capitalistiques ;

- l’origine – locale ou extra-régionale – des fonds mobilisés comme des administrateurs des établissements bancaires ;

- le profil social et professionnel de la clientèle et, par extension, la destination des fonds détenus ou prêtés par les banques normandes ;

- l’ampleur des mouvements d’argent prêtés ou escomptés, en moyenne et longue durée.

B. Succès et limites de la prévoyance des Caisses d’Épargne normandes

En Normandie, la plus ancienne Caisse d’Épargne est celle de Rouen créée sous forme de Société anonyme par une ordonnance du Roi Louis XVIII datée du 30 mars 1820. Dès janvier 1822, une institution similaire apparaît au Havre. La majeure partie des créations datent cependant de la Monarchie de Juillet, l’époque de Guizot, député de la circonscription de Lisieux et plusieurs fois ministre de Louis-Philippe, auteur en mars 1834 d’un célèbre « Enrichissez-vous par le travail et par l’épargne ». Au total, sur les 46 établissements créés dans les cinq départements normands, 31 le sont entre 1834 (Cherbourg) et 1845 (Flers). Les deux dernières créations datent de 1878 (Saint-Pierre-sur-Dives) et 1880 (Trouville). Il serait sans doute utile de connaître avec davantage de précision les modalités des différentes créations.

Il s’agit d’institutions principalement urbaines même si l’apparition de succursales permet par la suite de diffuser l’idée d’épargne organisée dans les campagnes environnantes. En fait on cherche surtout, au moins dans un premier temps, à promouvoir les bonnes habitudes liées, pense-t-on, au développement de l’idée de prévoyance parmi les milieux populaires et notamment les ouvriers. En réalité, la Caisse d’Épargne ne pouvait jouer qu’un rôle, certes non négligeable mais limité dans la lutte contre l’extension du paupérisme par le biais du livret de Caisse d’Épargne dont la création est devenue le symbole de l’institution. Cependant, une étude plus fine des déposants et de la représentation sociale de l’institution, notamment dans la presse, en particulier lors des crises politiques et financières, pourrait amener à nuancer cette appréciation générale. Toutefois, même sous le Second Empire où l’on observe un développement de l’épargne populaire, cela ne concerne qu’une partie réduite des catégories les plus modestes de la société. De même, le fort accroissement des dépôts d’épargne dans les années 1880, observable en Normandie comme dans l’ensemble national, doit être imputé davantage à l’afflux de déposants relativement aisés attirés par un intérêt rémunérateur dans une période de crise des placements plus qu’à l’arrivée en masse de membres des milieux populaires. Cette évolution a d’ailleurs suscité des critiques contre la « déviation » du rôle des Caisses d’Épargne de la part de certains notables. Pour d’autres, en particulier les dirigeants du mouvement socialiste, l’idée même d’épargne, en régime capitaliste, devait être condamnée.

Ces critiques n’ont pas empêché la diffusion de l’esprit d’épargne fortement encouragée en particulier par les responsables politiques et les notables des débuts de la Troisième République. En 1880, le taux de pénétration du livret de Caisse d’Épargne est de 13,8 livrets pour cent habitants en Haute Normandie (15,5 en Seine-Inférieure ; 10,1 dans l’Eure). À titre comparatif, le taux de pénétration est de 7,8 % seulement en Basse Normandie. Ainsi l’épargne est alors surtout un fait urbain, ce qui mériterait sans doute d’être nuancé.

Cependant, pour contrebalancer cette réalité, une proposition de loi déposée par le député de la Manche Legrand a visé à établir des guichets d’épargne là où n’existait aucune caisse. Cette idée est reprise par le gouvernement dans un projet de loi daté du 1er juillet 1880 qui envisage la création d’une Caisse d’Épargne postale s’appuyant sur l’infrastructure des bureaux de poste. La loi est adoptée le 9 avril 1881. Elle cherche à maintenir une forme d’équilibre entre les deux réseaux de collecte de l’épargne, en faisant bénéficier les Caisses d’Épargne ordinaires, qui ne peuvent s’appuyer sur des structures administratives, d’un écart de taux de 0,50 % destiné à couvrir leurs frais de gestion. Malgré cet avantage la concurrence de la Caisse d’Épargne postale risquait d’être particulièrement vive dans les villes disposant de plusieurs bureaux de poste. De fait, après les quelques années nécessaires à la mise en place et à la régularisation du fonctionnement de la caisse postale, le développement de la concurrence entre les deux institutions paraît réel dans les villes les plus importantes. Au milieu des années 1880, il y a toujours une prépondérance de la collecte de l’épargne urbaine sur celle des campagnes, y compris dans le cadre de la Caisse d’Épargne postale. Toutefois, ce constat, qui concerne principalement la Seine-Inférieure, doit être nuancé au vu des résultats obtenus par les autres départements normands, moins urbanisés. En effet, si l’on considère les moyennes générales des opérations effectuées par les caisses postales, elles apparaissent nettement meilleures dans les départements ruraux. Ainsi en 1886, le Calvados se situe au 12e rang, l’Orne et la Manche respectivement aux 24e et 25e rangs, l’Eure au 39e rang alors que la Seine-Inférieure ne vient qu’en 68e position.

Au total, la concurrence que pouvait faire la nouvelle forme de collecte de l’épargne aux anciennes Caisses d’Épargne ordinaires, principalement situées en ville, est cependant demeurée limitée. Les caisses ordinaires ont continué leur essor en adoptant leurs horaires d’ouverture des guichets, en développant de nouvelles formes d’épargne, comme l’épargne scolaire, et en ouvrant des succursales. Le dynamisme des établissements en la matière a pu donc être fort variable, ce qui mériterait d’être étudié de plus près. Néanmoins, de manière générale, les Caisses d’Épargne ordinaires poursuivent leur essor. En témoigne notamment la construction d’hôtels des Caisses d’Épargnes, véritables temples de l’épargne, particulièrement durant les années 1860-1900. Ces constructions, souvent inspirées par l’architecture de l’ère haussmannienne, avec des adaptations liées aux changements de régimes (apparition d’emblèmes républicains notamment), consacrent l’institutionnalisation des Caisses d’Épargne, en France et en Normandie, le « pays de Sapience », comme on la qualifie fréquemment à l’époque. Il y aurait sans doute une étude à faire du contexte et des modalités de création de ces « Hôtels de Caisse d’Épargne » et de leurs éventuelles spécificités normandes avec leurs évolutions dans la longue durée.

De même, avec la montée en puissance de la concurrence du système bancaire, principalement à partir des années 1960, les Caisses d’Épargne normandes ont été amenées à diversifier leurs activités. Déjà la loi Minjoz de 1950 avait favorisé la participation des Caisses d’Épargne à la reconstruction du pays, en leur permettant de consacrer une partie des fonds déposés et de leurs excédents à des opérations d’intérêt public. Dès lors, le milieu des années 1960 marque la fin de la monoculture et de l’exclusivité du « Livret A » avec la création du « Livret Épargne-Logement » puis du « Livret supplémentaire » ouvert à tous. Cette évolution a été accompagnée par un processus de rapprochement puis de fusion entre caisses, entrepris principalement à partir des années 1990, tandis que les Caisses d’Épargne prenaient le statut de banques coopératives. Après les créations des Caisses d’Épargne de Basse et Haute-Normandie, la fusion des deux Caisses normandes intervient en 2008. Il s’agit dès lors du principal établissement de banque coopérative rayonnant sur l’ensemble de la Normandie. Bien évidemment, cette transformation radicale a pu être perçue différemment selon les localités et aussi la clientèle et le personnel des anciennes caisses locales.

 

3 - USAGES ET PRATIQUES

A. Comptabilités

Quelques généralités

Les premières comptabilités apparaissent au xiiie siècle et elles se développent à la fin du Moyen Âge. Ce sont des comptabilités publiques émanant des autorités royales ou seigneuriales. Pour la période moderne, on peut trouver des comptabilités de l’administration royale dans les riches fonds des intendances de Rouen, Caen et Alençon (série C des Archives départementales), mais aussi des comptabilités personnelles dans les livres de raison ou les journaux intimes. Pour la période contemporaine, les sources publiques sont toujours très riches, mais l’on peut également consulter plus facilement des comptabilités privées.

 

L’ARCD s’est depuis longtemps intéressée aux comptabilités des comtes d’Artois, princes apanagistes détenant « la terre de Domfront ». Nous allons donc privilégier cet exemple et celui des comptabilités médiévales, sous la plume de son président, Jean-Philippe Cormier.

L’exemple des comptabilités publiques médiévales (XIIIe-XVe siècle)

Les documents relevant des comptabilités publiques pour la Normandie médiévale restent rares, surtout pour les périodes anciennes, antérieures au xive siècle.

Pour la période des ducs-rois, on dispose de mandements, d’hommages, de dons, mais rarement de documents comptables au sens strict, établissant les recettes et les dépenses. Les registres de la chancellerie du roi Philippe Auguste, à partir de 1204, recueils de diplômes, chartes et lettres pour plus de la moitié de leur contenu, majoritairement d’origine royale, sont une bonne source de renseignements. On y trouve la transcription d’enquêtes faisant état des droits du roi et des revenus tirés des forêts, des péages, de la justice, des fiefs, des églises et d’autres recettes domaniales. Certains inventaires ont un caractère fiscal avéré, notamment ceux consacrés aux revenus forestiers, aux dettes à l’égard des Juifs, aux recettes domaniales (cens).

Pour la fin du xiiie siècle, puisque le congrès se tiendra à Domfront, on mentionnera en particulier les huit comptes établis par les baillis de Robert II d’Artois pour la « terre de Domfront », en fait un petit bailliage excentré par rapport à l’apanage du comte, conservés aux Archives du Pas-de-Calais et aux Archives nationales[1].

Les documents se font plus nombreux par la suite. En 1871, Léopold Delisle publia un recueil des Actes normands de la Chambre des Comptes sous Philippe de Valois (1328-1350). On y trouve de nombreux actes comptables, par exemple les Parties de commune despense de la baillie de Costentin à compter au terme de Pasques l’an M CCC XXXI (n° 8), les fragments de compte de la baillie de Rouen à Pâques 1334 (n° 42) ou encore ce fragment d’un compte des biens qui avaient appartenu à Robert d’Artois en Normandie – 1335 (n° 48), que l’on peut rapprocher d’une copie partielle des comptes de la vicomté de Domfront pour les années 1332-1343, faite au xvie siècle et conservée aux Archives nationales[2].

Les rouages comptables de l’apanage d’Alençon sont étudiés par Franck Mauger dans sa thèse, Le dernier apanage. Gouvernement et administration des comtés d’Alençon et du Perche (1290-1525), Université de Caen Normandie, 2017.

Pour la première moitié du xve siècle, subsistent quelques rares comptes de vicomté, qui sont de première importance pour appréhender les comptabilités publiques au niveau local : fragments pour la vicomté d’Avranches aux termes de Pâques 1410 et 1415[3] ; copie du xviie siècle du compte de la Saint-Michel 1431 de la vicomté de Rouen[4] ; journal des seules recettes pour celle de Valognes aux termes de Pâques et de la Saint-Michel 1439[5] ; fragments pour les vicomtés de Montivilliers et Neuchâtel[6] ; compte de la vicomté de Carentan de 1426[7].

Le compte de Jean le Muet, vicomte d’Orbec, pour le terme de la Saint-Michel 1444 est fort heureusement conservé dans son intégralité[8] et publié par Henri de Frondeville[9]. La médiathèque d’Argentan conserve des comptes de la vicomté d’Exmes (des brouillons ?) pour les années 1445-1447, mais la série n’est pas complète[10].

Une fois encore, la vicomté de Domfront apparaît privilégiée, puisque subsistent, complets, les comptes de quatre termes consécutifs remontant au début de l’occupation anglaise, de la Toussaint 1419 à l’Ascension 1421[11], auxquels on peut ajouter divers fragments subsistants de comptes des années 1420[12].

Pour l’ensemble de la Normandie, subsistent les comptes de Pierre Surreau, receveur général de Normandie pour la période novembre 1423-janvier 1425[13], la partie consacrée aux seules dépenses de 1424-1426[14], ainsi que son compte qui couvre la période entre le 1er octobre 1428 jusqu’au 30 septembre 1429[15].

À partir de la deuxième moitié du xve siècle, les sources se font plus nombreuses. Pour les comptabilités publiques, de nouvelles ressources se trouvent dans les archives des bureaux de finance des généralités.

B. Prix et salaires

On ne travaille que pour recevoir l’argent nécessaire à la vie quotidienne. C’est pourquoi l’étude des salaires est un élément fondamental pour la compréhension de la place de l’argent dans le fonctionnement d’une société. La première approche, apparemment la plus simple, consiste à en suivre les évolutions au cours d’une période donnée. Pourtant, cette étude n’est pas aussi facile qu’il peut le sembler à première vue, surtout quand on dispose de données supposées fiables, ce qui n’est pas toujours le cas, en particulier pour les périodes anciennes comme la fin du Moyen Âge où de nombreuses comptabilités fournissent de multiples données chiffrées.

En fait, les salaires sont très souvent composites et ils peuvent comporter une partie en nature qui n’est pas toujours comptabilisée. Cela peut aller de la fourniture de la nourriture au logement ou à l’achat de vêtements à certaines occasions selon un rythme fixé par le contrat d’embauche. L’étude de la part non monétaire des salaires est donc un aspect important, dont l’évolution peut être révélatrice de celle d’une société. Il faut évidemment faire la part des salaires urbains et des salaires ruraux, souvent plus faibles, mais avec des éléments non monétaires longtemps plus conséquents.

L’essentiel dans une étude des salaires est de savoir s’ils permettent à ceux qui les reçoivent de vivre convenablement. L’étude du pouvoir d’achat au cours d’une période fournit bien des éléments intéressants sur les niveaux de vie. Pourtant, là encore, les données ne sont pas faciles à utiliser et il faut tenir compte de l’évolution de la valeur des monnaies. Il a été longtemps habituel de « déflater » les salaires, c'est-à-dire de les exprimer en quantité de blé quand le prix de celui-ci est connu. La méthode peut être utile mais de nouvelles approches seraient souhaitables, car les qualités de blé sont variables et le poids du pain vendu en période de crise peut diminuer sans que le prix change. Des recherches aussi détaillées que possibles sur les budgets seraient donc très bienvenues.

C. Le commerce

Si l’étude du commerce à une période donnée doit évidemment comporter des éléments concernant les produits échangés et les principaux courants qui l’animent, l’attention doit avant tout se porter sur le paiement de ces transactions. C’est en étudiant la répartition des sommes engagées dans les échanges de marchandises qu’on pourra se faire une idée des évolutions générales de l’économie et, de ce fait, de l’évolution des fortunes des marchands. Il serait d’ailleurs intéressant de voir comment les fortunes accumulées grâce au commerce sont utilisées, en achat de biens mobiliers ou immobiliers ou de seigneuries permettant d’accéder à la noblesse. Une étude des alliances matrimoniales de ces familles avec ce qu’elles contiennent en dot et autres éléments matériels, par exemple dans les affaires, serait très révélatrice.

Il faut aussi faire la part du commerce local à caractère « artisanal ». C’est le commerce de tous les jours pour les salariés et il serait utile, en fonction de sources chiffrées, de voir quels sont les secteurs qui sont les plus importants : la viande, le pain, les vêtements, éventuellement les loyers. La part du crédit est évidemment fondamentale et une présentation des moyens d’emprunter de l’argent serait d’un grand intérêt. L’étude des procédés utilisés par les créanciers pour se faire rembourser est aussi très révélatrice et devrait permettre de repérer des différences selon les milieux : du rééchelonnement des dettes à la confiscation des biens.

Les méthodes de paiement des échanges commerciaux sont également un aspect de notre question. Il n’est pas toujours très sûr de faire voyager de grosses sommes d’argent. C’est pourquoi bien des moyens ont été mis au point pour éviter les transferts monétaires. Les lettres de change, l’utilisation de facteurs pour payer sur place des vendeurs, tandis que leurs associés recevaient sur le lieu d’arrivée l’argent des marchandises, sont des éléments à analyser de manière concrète et détaillée. Enfin, il faudrait aussi se pencher sur les monnaies utilisées et sur les problèmes de change.

 

 

4 - RÉALITÉS ET IMAGINAIRE DE L’ARGENT

A. Fortunes et avoirs des Normands

Au début de la pandémie mondiale, en avril 2020, un journaliste américain, qui devait s’ennuyer durant son confinement, tenta de réaliser le classement des hommes les plus riches de tous les temps. Tandis que le célèbre John D. Rockefeller montait sur la troisième marche du podium, Guillaume le Conquérant n’aurait pas eu à rougir de la septième place qui lui était attribuée, avec plus de 200 milliards de dollars ! Si l’on doute fortement qu’un tel calcul puisse être réalisé, il n’empêche que celui qui devint roi d’Angleterre détenait en effet une véritable fortune. Est-ce à dire que tous les Normands étaient riches ?

La Normandie, c’est certain, l’était dans son ensemble. Ne fournissait-elle pas Paris en bœufs et en laitages ? Riche à ce point que fiscalement, depuis la guerre de Cent Ans, elle était la principale ressource des souverains, comptant pour un quart dans les recettes de François Ier. On n’oubliera pas cependant que, si des cadets de la noblesse tentèrent leur aventure ailleurs – comme les Hauteville en Italie ou Charles Houel et les siens dans les Antilles –, c’était généralement pour faire fortune. Par ailleurs, la province connut de nombreuses révoltes antifiscales, dont la plus célèbre est sans doute celle des Nu-pieds.

Pour en savoir plus sur les avoirs des Normands, et estimer leur niveau de fortune, les historiens des temps modernes peuvent compter, par exemple, sur les inventaires après-décès. Souvent utilisés pour la culture matérielle, les études sur la consommation ou pour la généalogie, c’est dans ce domaine qu’ils mériteraient pourtant d’être dépouillés de façon sérielle, ce qui n’a guère été fait. En effet, au-delà-des liquidités qui peuvent y figurer, l’inventaire des papiers permet généralement de réaliser la balance des dettes passives et actives : en gros, des avoirs et des dépenses. Tout en songeant que, les Normands, taiseux, étaient plutôt réputés pour dissimuler leur richesse…

Aucune étude n’a jusqu’à présent été réalisée sur les « Fortunes et avoirs des Normands ». Tout juste leur niveau de vie a-t-il été approché[16], ainsi que le train de vie des institutions villageoises[17]. Des indications, des pistes, ainsi que quelques données précieuses figurent bien çà et là dans des ouvrages ou des articles sur la production des richesses agricoles[18], le foncier[19], le patrimoine[20], la thésaurisation de métaux précieux[21], etc. Mais c’est sans doute insuffisant et la thématique reste en chantier, offrant de nombreuses opportunités de communications à l’occasion de ce congrès.

 

B. Les Normands et l’argent dans la littérature et les arts

Quelques généralités

Au fil des siècles, on trouve en Normandie de nombreux artistes qui ont abordé, d’une manière ou de l’autre le thème « Les Normands et l’argent ».

Dans le domaine des arts plastiques, la Normandie a compté beaucoup de sculpteurs, peintres et maîtres verriers, dont les œuvres pourraient être envisagées sous cet angle. Pour le Moyen Âge et la Renaissance, le vitrail et la peinture murale nous fournissent de nombreuses scènes liées à l’argent. On pourrait étudier, en particulier, le personnage de saint Éloi, dont l’activité d’orfèvre est souvent mise en valeur.

Pour les périodes suivantes, la peinture à l’huile, sur bois ou sur toile, paraît la plus à même d’évoquer la question de l’argent. On pourrait commencer par la peinture religieuse, illustrée par de nombreux artistes locaux dont les œuvres se trouvent encore dans les églises normandes. Sans espérer trouver l’équivalent de « La vocation de saint Matthieu » du Caravage (église Saint-Louis des Français de Rome), on peut découvrir des œuvres consacrées à ce saint, lié à l’argent en tant que collecteur d’impôt. Cependant, il faut surtout se tourner vers la peinture du xixe siècle, qui représente très fréquemment des membres de la classe supérieure, celle qui détient la richesse. Certains peintres normands montrent bien la réalité de leur temps, comme le Honfleurais Eugène Boudin (1824-1898). Cependant, la Normandie a été abondamment visitée et peinte par des artistes parisiens, dont les plus célèbres sont les impressionnistes, guidés par leur chef de file, Claude Monet (1840-1926). Ces peintres montrent en détail les costumes de leurs contemporains normands, et surtout les robes des femmes de la bonne société, souvent ornées d’onéreuses dentelles, de Bayeux et d’Alençon notamment.

C’est toutefois le domaine de la littérature qui apparaît comme le plus prometteur. Des écrivains parisiens sont venus en Normandie et en ont décrit sans complaisance la société « provinciale », comme Honoré de Balzac (1799-1850). Ce dernier a visité Bayeux et Alençon et en a tiré des romans, la Femme abandonnée et La Vieille fille. La Normandie a aussi généré ses propres auteurs, comme Gustave Flaubert (1821-1880), Guy de Maupassant (1850-1893) ou Octave Mirbeau (1848-1917). Les uns et les autres étaient des bourgeois, et pourtant ils ont croqué sans pitié les hommes et les femmes appartenant à leur milieu social. À cet égard nous pouvons insister sur l’exemple le plus caractéristique, celui de Flaubert, ici présenté par Yannick Marec.

Un exemple : Flaubert, la Normandie et l’argent

Le xixe siècle est marqué par la montée en puissance de l’économie capitaliste avec notamment le développement de la Bourse et le rôle accru des banques qui supplantent les rouages traditionnels des réseaux financiers, les négociants et les notaires, voire les usuriers sans pour autant les faire disparaître totalement.

Dans ce contexte, l’affirmation du rôle de l’argent dans les relations sociales a pu être mise en cause voire condamnée par certains auteurs attachés à l’art pour l’art et refusant la marchandisation de la vie littéraire.

C’est ce que l’on peut percevoir, de manière à la fois explicite mais aussi paradoxale chez Flaubert. Celui-ci est assurément un héritier dont le père, chirurgien chef de l’Hôtel-Dieu de Rouen possédait au moment de son décès en 1846 une fortune qui représentait l’une des cinq principales successions rouennaises de l’année. Son épouse a su faire fructifier le patrimoine familial en agrandissant de manière significative, le total de ses biens propres jusqu’à son décès en 1872. Cependant, Madame Flaubert, qui se méfiait du comportement dépensier de son fils cadet, ne lui a pas permis de percevoir directement le capital auquel il aurait pu avoir droit après le décès de son père. Il n’en touchait qu’une rente annuelle.

Par ailleurs, après le décès de sa mère, Flaubert a dû vendre une bonne partie de ses biens pour faire face à la ruine de son neveu par alliance, Commanville, propriétaire d’une scierie et négociant en bois. À la fin des années 1870, malgré ses réticences, Flaubert doit accepter, pour pouvoir subsister, une place de conservateur adjoint hors cadre à la bibliothèque Mazarine de Paris, une solution trouvée par son entourage amical.

C’était donc bien un héritier rouennais mais un héritier qui ne disposait pas de l’intégralité de son héritage et qui était constamment à la recherche d’argent.

Il existe chez Flaubert une forte dénonciation du rôle de l’argent dans la société de son temps. À l’occasion d’un dîner chez la princesse Mathilde recevant plusieurs médecins, il aurait ainsi dénoncé la caste des médecins attirés par l’argent, en exceptant toutefois son père qui acceptait de dépenser « 200 Fr. de frais de poste pour aller faire dans quelque coin du département, une opération à une poissonnière, qui le payait avec une douzaine de harengs »[22].

De manière plus explicite encore, il écrit à son ami Tourguéniev, en juin 1872, qu’il préfère se laisser dépouiller plutôt que de se défendre « non par désintéressement, mais par ennui, par lassitude. Quand il s’agit de matière d’argent, il me prend comme une rage de dégoût qui touche à la démence ».

Il y a surtout chez Flaubert une volonté d’opposer l’argent à l’art. Selon lui, l’artiste doit travailler avec un désintéressement total, qui dépasse même le seul souci de gain financier : « On n’a rien pour se soutenir rien, oui rien, c’est-à-dire aucun espoir d’argent, aucun espoir de célébrité, ni même d’immortalité », écrit-il à Louise Colet en 1852.

Flaubert s’indigne aussi des préoccupations d’argent qui transparaissent dans la correspondance de Balzac. Bien plus, il dénonce la montée du rôle de l’argent dans la société de son temps, sans se faire d’illusions sur l’avenir : « Je me demande si dans quelque temps il sera possible de vivre sans s’occuper d’argent, sans être banquier, sans vendre ou acheter n’importe quoi. – Jolie perspective pour l’humanité ! – Tous épiciers ! »

La question de l’argent sous-tend bien des aspects de l’œuvre de Flaubert. Dans Madame Bovary, il s’attache à décrire une société où les relations sont fortement conditionnées par les questions d’argent, et notamment le rôle de la rente, à une époque que l’on peut situer sous la Monarchie de Juillet (1830-1848), au temps du « roi-bourgeois » Louis-Philippe.

Les banques de dépôt n’existaient pas encore en France et ce sont les notaires et différents intermédiaires plus ou moins usuriers qui servaient de gestionnaires des fortunes. Ainsi les intrigues d’argent combinées au caractère dépensier d’Emma Bovary dont profite en particulier le marchand d’étoffe Lheureux la conduisent au suicide. La chute finale et le désastre financier font que Berthe, la fille d’Emma et de Charles qui est mort de chagrin, est condamnée au sort d’une ouvrière d’usine. L’écrivain s’est aussi renseigné sur les opérations financières de son époque, ce qui atteste de son souci de réalisme. Il prend aussi en compte les nouvelles formes d’encouragement à l’épargne par le biais notamment d’un mouvement de création de Caisses d’Épargne, qui se manifeste dès les années 1820 et qui s’affirme particulièrement en Normandie sous la Monarchie de Juillet. Flaubert fait ainsi de nombreuses allusions à la Caisse d’Épargne dans Madame Bovary lorsqu’il évoque les espérances de l’officier de santé Charles Bovary : « Il réfléchissait. Il pensait à louer une petite ferme aux environs, et qu’il surveillerait lui-même, tous les matins, en allant voir ses malades. Il en économiserait le revenu, il le placerait à la Caisse d’Épargne ». Notons, cependant, le scepticisme de l’écrivain par rapport à l’institution de prévoyance. Au mot « Épargne » (Caisse d’) du Dictionnaire des idées reçues, il la qualifie d’« occasion de vol pour les domestiques », semblant reprendre une des idées convenues de son temps. Ce thème, il est vrai, apparaît dans différents ouvrages de cette époque, notamment dans celui de De Lérue, Maîtres et domestiques (Rouen, 1862).

Dans L’éducation sentimentale, le souci de réalisme est également très présent, en ce qui concerne les allusions à l’argent. Ceci peut d’ailleurs dérouter quelque peu le lecteur d’aujourd’hui, peu coutumier des pratiques du xixe siècle et des sommes évoquées, avec des dénominations anciennes souvent mêlées et devenues peu compréhensibles. Il est ainsi question aussi bien de Napoléons que de Louis, d’écus, de livres, de sols et de francs. Surtout, l’argent joue un rôle déterminant dans la construction du récit avec, par exemple, les effets supposés ou réels de l’héritage de Frédéric, le personnage principal. De même, la fin du roman est marquée par les problèmes d’argent qui conduisent Frédéric à la rupture avec Madame Arnoux et Madame d’Ambreuse.

Les exemples pourraient être multipliés et traduisent une forme d’obsession par rapport aux questions d’argent que Flaubert vivait lui-même, si l’on en croit la prégnance de ces thèmes dans sa correspondance. Ainsi l’édition électronique de sa correspondance retient 414 lettres faisant allusion au thème de l’argent.

En conclusion, on peut percevoir combien la question de l’argent est présente chez Flaubert. Cela s’est traduit chez l’écrivain normand par la défense résolue de l’art pour l’art, en dépit des contingences matérielles pourtant très présentes et de la montée en puissance du rôle de l’argent dans la société de son temps.

 

 

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

 

GÉNÉRALITÉS

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Mémoire de la protection sociale en Normandie, n° 15, années 2019-2020, Dossier d’Études « Histoire des Caisses d’épargne en Normandie (1820-2020) » (contributions de Yannick Marec et Vincent Tournié, p 53-148).

Michalet Charles-Albert, Les placements des épargnants français de 1815 à nos jours, Paris, PUF, 1968, 412 p.

Tournié Vincent, Épargne et crises politiques en France. Les mouvements de panique dans les Caisses d’épargne au XXe siècle, Paris, Economica, 2011, 336 p.

 

3 - USAGES ET PRATIQUES

A. Comptabilités (médiévales)

Le Domfrontais médiéval, numéros 1 à 26.

Cormier Jean-Philippe, « Fragments de comptes de la vicomté de Domfront sous l’occupation anglaise (années 1420) », Le Domfrontais médiéval 22, 2012-2013, p. 35-63.

‒, « Documents domfrontais de Robert II d’Artois », Le Domfrontais médiéval, 25, 2018-2019, p. 43-72.

Delisle Léopold, Actes normands de la Chambre des Comptes sous Philippe de Valois (1328-1350), Rouen, Le Brument, 442 p.

Dupont André, « Pour ou contre le roi d’Angleterre », Bulletin de la Société des Antiquaires de Normandie, t. 54, 1957-1958, p. 148 et sv.

Frondeville Henri de, La Vicomté d'Orbec pendant l'occupation anglaise (1417-1449) : Compte de Jean Le Muet, vicomte d'Orbec, pour la Saint-Michel 1444, Études lexoviennes, t. IV, Caen, 1936.

Mauger Franck Le dernier apanage. Gouvernement et administration des comtés d’Alençon et du Perche (1290-1525), Thèse de doctorat sous la direction de F. Neveux, Université de Caen Normandie, 2017.

Milet A., « Comptabilité publique sous la domination anglaise au XVe siècle : comptes de la vicomté de Neufchâtel, 1443 et 1456 », S.H.N., Mélanges : documents, t. VII, Rouen, 1907, p.195-221.

B. Prix et salaires

Bois Guy, Crise du féodalisme. Économie rurale et démographie en Normandie orientale du début du XIVe siècle au milieu du XVIe siècle, Presses de l’EHESS, 1974.

Margairaz Michel et Pigenet Michel, Le prix du travail. France et espaces coloniaux. XIXe-XXe siècles, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2019.

Sauvy Alfred et, Depoid Pierre, Salaires et pouvoir d’achat des salariés et des fonctionnaires entre les deux guerres, Paris, Institut national du travail et d’orientation professionnelle, 1940.

Sosson Jean-Pierre, Thiry Claude, Thonon Sandrine, Van Hemelrych Tania, Les niveaux de vie au Moyen Âge. Mesures, perceptions et représentations, Louvain-la-Neuve, Academia Bruylant, 1999.

C. Le commerce

Cailleux Philippe, Trois paroisses de Rouen : Saint-Lô, Notre Dame la Ronde et Saint-Herbland. XIIIe-XVe siècle, Rouen / Caen, Pôle universitaire normand, Presses Universitaires de Caen, 2011.

Mollat du Jourdin Michel, Le commerce maritime normand à la fin du Moyen Âge. Étude d’histoire économique et sociale, Paris, Plon, 1952.

 

4 - RÉALITÉS ET IMAGINAIRE DE L’ARGENT

A. Fortunes et avoirs des Normands

Béaur Gérard, « Le marché foncier en Basse-Normandie à la fin de l’Ancien Régime. Domfront, Livarot et Sées autour de 1780 », Enquêtes rurales, 2 : Paysages ruraux et société en France septentrionale, Caen, PUC, 1997, p. 71-86.

Boudjaaba Fabrice, « Femmes, patrimoine et marché foncier dans la région de Vernon (1760-1830) », Histoires et société rurales, 28, 2007/2, p. 33-66.

Dickinson John, « Niveaux de vie des paysans normands et québécois au XVIIIe siècle », Famille, économie, et société rurale en contexte d’urbanisation (XVIIe-XXe siècle), Actes du colloque d'Histoire comparée Québec-France tenu à Montréal en février 1990, Chicoutimi, SOREP / Paris, EHESS, 1990, p. 213-224.

Dumas Françoise et Monard Raymond, « L’argent caché par Pierre Leclert en 1420 (trésor de Lessay) », RN 1978, p. 131-156 + pl. XIX-XXIII.

Follain Antoine, « Une comptabilité villageoise normande du XVIe siècle », Histoire et sociétés rurales, 6, 2nd semestre 1996, p. 127-142.

Foisil Madeleine, La Révolte des nu-pieds et les révoltes normandes de 1639, Paris, PUF, 1970.

Garnier Bernard, « Des bœufs pour Paris : commercialisation et élevage en Basse-Normandie (1700-1900), Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest 106/1, 1999, p. 101-120.

Jambu Jérôme, « Thésauriser dans les campagnes à l’époque moderne : premières considérations », L’Épargne sous l’Ancien Régime, Paris, APHE, 2004, p. 63-71

‒, Tant d’or que d’argent. La monnaie en Normandie à l’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècle), Rennes, PUR, 2013.

Lemonnier-Lesage Virginie, « La gestion du patrimoine des époux normands à la fin du XVe siècle : l’éclairage du tabellionage de Bellencombre », Tabularia [En ligne], Richesse du tabellionage normand au Moyen Âge, 2020.

Moesgaard Jens Christian, « Bourses perdues ? Quelques petits trésors de la Seine-Maritime (XVIIe-XVIIIe siècles) », BSFN, janvier 1994, p. 723-726.

Poncet Fabrice, Plus de beurre que de pain ? La spécialisation agricole en Normandie (XVe-XIXe siècles), thèse de doctorat, Université de Caen, 2015.

B. Les Normands et l’argent dans la littérature et les arts

Flaubert et l’argent

Chaline Jean-Pierre, « Flaubert, un bourgeois de Rouen ? » Études normandes, n° 19, septembre-novembre 2021, Flaubert et la Normandie, p. 6-11.

– , « Flaubert, bourgeois malgré lui ? », Journée d’études. Hommage à Flaubert. Bicentenaire de sa naissance en 1821. Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Rouen, 2022, p. 27-33.

Fauvel Daniel et Hangard Hubert, Fortune et infortune des Flaubert, 3 t. Wooz éditions, 2018-2020.

–, « Les propriétés des Flaubert en Normandie », Études normandes, n° 19, septembre-novembre 2021, Flaubert et la Normandie, p. 13-20.

Marec Yannick, « Gustave Flaubert : un héritier rouennais du XIXe siècle ? » Bulletin Flaubert-Maupassant, n° 27 (dossier « Les Flaubert et l’argent ») 2012, p 7-22

–, (avec Gisèle Séginger), entrée « Argent » du Dictionnaire Flaubert, sous la direction de Gisèle Séginger, Paris Champion, 2017, p 94-98.

–, « L’argent dans les sociétés française et russe du XIXe siècle d’après Gustave Flaubert (1821-1880) et Ivan Tourgueniev (1818-1883) », Colloque La vie socio-culturelle de l’Europe et de la Russie vue par des intellectuels du XIXe siècle, Orel, Russie, 29-30 octobre 2018, Université d’État d’Orel Tourgueniev, 2020 p 24-31.

Robert Joëlle, « Madame Bovary et l’argent », Bulletin Flaubert-Maupassant, n° 27, (dossier « Les Flaubert et l’argent »), 2012 p 117-128.



[1] J.-Ph. Cormier, Le Domfrontais médiéval, 25, 2018-2019, p. 43-72.

[2] Archives Nationales (AN), J 780.

[3] Bibliothèque nationale de France (BnF) fr., 26045, n° 5899-5900 ; fr. 26041, n° 5022-5029.

[4] Archives départementales de Seine-Maritime, J 759.

[5] BnF, Nv acq fr. 20929.

[6] A. Milet, 1907.

[7] A. Dupont, 1957-1958, p. 148 et sv.

[8] BnF fr. 8769

[9] Études lexoviennes, t. IV, Caen, 1936.

[10] Médiathèque d’Argentan, Ms. 17.

[11] British Library. Add. Ms. 21364, édité dans Le Domfrontais médiéval, n° 5, 1987, au n° 23, 2014-2015.

[12] J.-Ph. Cormier, 2012-2013.

[13] BnF fr. 4485.

[14] BnF fr. 4491.

[15] BnF fr. 4488.

[16] Dickinson 1990.

[17] Follain 1996.

[18] Garnier 1999 ; Poncet 2015.

[19] Béaur 1997.

[20] Boudjaaba 2007 ; Lemonnier-Lesage 2020.

[21] Dumas, Monard 1978 ; Moesgaard 1994 ; Jambu 2004 et 2013.

[22] Journal des Goncourt. Mémoires de la vie littéraire, t. V, mercredi 28 janvier 1874.


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58e Congrès des Sociétés historiques et archéologiques de Normandie

À   DOMFRONT, du 11 au 14 octobre 2023.

 

LES NORMANDS ET L’ARGENT

 

Proposition de communication

 

Les propositions de communication seront examinées au printemps 2023 (pour une réponse mi-avril) par le comité scientifique du congrès qui retiendra en priorité les travaux les plus innovants par leur problématique ou leurs sources et ceux qui s’inscrivent le mieux dans le thème tel qu’il est défini par les orientations de recherche indiquées dans la circulaire d’annonce.

La durée des communications ne doit pas excéder vingt minutes.

Un vidéoprojecteur sera à la disposition des orateurs (prévoir une clef USB à enregistrer avant la séance). Les auteurs s’engagent à présenter leur communication à l’horaire défini par les organisateurs. Ils demeurent propriétaires de leur texte, mais réservent, à titre gracieux, la priorité de sa publication aux actes du congrès. Ils recevront après le congrès les consignes de présentation de leur texte écrit, dont la longueur sera de l’ordre de 25 000 à 35 000 signes (caractères+espaces) selon le nombre de communications retenues.

À retourner avant le 27 mars 2023 (délai de rigueur) à secretaire@fshan.fr ou fshan@laposte.net

 

NOM :                                              Prénom :

Adresse :

Téléphone :                                    Courriel : 

Société adhérente à la FSHAN ou organisme :

propose de présenter une communication sur le thème suivant :

Titre 

 

RÉSUMÉ (une vingtaine de lignes) :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PRINCIPALES SOURCES UTILISÉES :

 

 

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