En matière d’enseignement, le mode simultané, nécessitant de s’adresser
au groupe, exige souvent une duplication des documents proposés aux élèves. Cette aspect, aujourd'hui, est résolu par la performance des moyens de reproduction mis à la disposition des
écoles. Hier, il l’était par les machines à reproduire des textes
dactylographiés au moyen de stencils placés sur une ronéo. La duplication pouvait aussi recourir à un duplicateur à alcool permettant un transfert de l’encre via une
solution à base d’alcool. Beaucoup ont connu ces pratiques. Préalablement, il
existait un moyen de reproduction appelé « La pierre humide ».
La PIERRE HUMIDE A REPRODUIRE, créée en 1913, est un procédé de
reproduction par polycopie, c’est-à-dire un tirage sans encrage ni mécanisme, d’une
centaine de copies à partir d’un original écrit avec des encres « Polyco »
ou tapé avec un ruban hectographique.
« La pierre humide à reproduire » se présente sous la
forme d'une pierre fine livrée souvent dans une boîte métallique avec
couvercle. Elle permet de décalquer l'écriture.
L'une des marques les plus connues fut la marque "Au cygne". La Maison de l’histoire de l’école dans la
Manche, MHEM, a la chance de disposer de deux exemplaires de cette pierre humide à
reproduire. En 2011, après un appel lancé sur mon blog, de bien
vouloir me contacter si le hasard faisait découvrir cet objet dans le fond d'un
grenier d'école ou de mairie, deux réponses me sont parvenues. L’une de Benoît
Decreuze, d’Ornans, me faisant parvenir un ancien modèle malheureusement
inutilisable parce que la pierre est desséchée ; la seconde m'a été donnée par Charlette
Baudoin-Burgard, d’Aix-en-Provence. Cet exemplaire, plus récent, est en parfait état de conservation et de
fonctionnement. Que l’un et l’autre de ces généreux donateurs en soient vivement remerciés. Ces deux
objets vont naturellement trouver leur place dans notre conservatoire.
Ils illustreront, à côté des duplicateurs à alcool, le grand
succès qu’a pu rencontrer ce procédé car, aussitôt le tirage fini, la plaque
est prête à recommencer immédiatement et cela plusieurs fois de suite.
Les témoignages de celles et ceux qui ont eu recourt à ce
procédé seront les bienvenus.
Le terme renvoie à la technique de la lithographie inventée par Senefelder en 1798 : sur une pierre calcaire polie, le motif est reproduit. La pierre est ensuite lavée à l’eau, puis est encrée au moyen d’un rouleau et seules les parties grasses retiennent l’encre. La feuille de papier est alors posée sur la pierre encrée et fortement pressée.
Ce principe a ensuite été décliné avec des techniques et des matériaux différents. Ce procédé a été adapté à des besoins scolaires et un moyen de reproduction intitulé « Pierre humide à reproduire » a été commercialisé. L’encre utilisée alors est une encre polycopiste extra-fluide « Au Cygne », de couleurs différentes.
La Fédération Internationale des Mouvements d'Ecole Moderne (Pédagogie Freinet), a consacré deux numéros évoquant la technique de la pierre humide :
La Fédération Internationale des Mouvements d'Ecole Moderne (Pédagogie Freinet), a consacré deux numéros évoquant la technique de la pierre humide :
- L'éducateur prolétarien, n°1, octobre 1932 ; y est mentionné le prix d’une "Pierre humide à reproduire" et de la gamme de l’encre « Au Cygne » (noir, carmin, vermillon, vert, bleu, jaune, bistre).
- La Brochure d'éducation nouvelle populaire, n° 45, avril-mai 1949, consacrée aux techniques d’illustration, évoque rapidement le procédé de la pierre humide.
Les encres « Au Cygne » ont pu être commercialisées par la marque allemande Schwan-Bleistift-Fabrik qui avait pris pour emblème un cygne (en allemand Schwan = cygne).
Yves Marion
27 janvier 2019. Mise à jour 14 décembre 2021
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Pierre humide MHEM. Coll. YM |
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Pierre humide MHEM. Coll. YM |