Projecteur La Providence vers 1950 |
Ah, quelle magie dans cette nouvelle lanterne !
De quoi en étonner plus d’un ! Autant et voir plus pour les enfants nés vers 1900 que pour les jeunes d’à c’t’heure avec leur smartphone et leur Facebook.Donc on est en 1880, de nouveaux procédés autorisent la projection d’images photographiques sous forme de positif sur verre, alors qu’auparavant on ne pouvait projeter que des dessins en petite dimension. Plus d’interprétation, de représentation, mais du vrai, du réel, de l’exact, de quoi transformer la projection lumineuse en projection éducative.
Au vrai, ce n’est qu’à partir de 1920 que l’école aura recours au film scolaire (animé ou fixe) et sa diffusion sera confiée au Musée pédagogique créé par Jules Ferry et Ferdinand Buisson (actuel INRP et CNDP).
Mais le succès de ce nouveau procédé pédagogique revient à l’éducation populaire et à son essor, qui à partir de 1894, offre aux jeunes sortis de l’école à 12 ans une « seconde instruction » : les cours d’adolescents et d’adultes créés par Victor Duruy . Les projections lumineuses assurent à ces manifestations un succès immédiat grâce à la nouveauté qu’elles représentent, car « l’appareil à projections a été une fête pour nos yeux » (Foix 1895), car « l’appareil à projections, l’enseignement par l’aspect fait merveille » (Edouard Petit, Inspecteur général, rapport au ministre en 1895-1896).
Mais ce modernisme, cette nouvelle technologie suscite immédiatement une réflexion. Ainsi naît la théorie de l’enseignement par l’aspect. Le même Édouard Petit peut écrire : « L’un des principaux attraits des conférences consiste dans les projections lumineuses : l’enseignement par l’aspect est plus qu’une distraction, un spectacle et une simple récréation, c’est une méthode ».
Et à Marseille, où on s’est doté d’une lanterne Molteni capable de projeter sur un écran de 16 mètres carrés, un jeune instituteur militant et partisan peut dire : « Nous ne nous proposons pas de donner des séances amusantes et de montrer comme on dit la lanterne magique. Notre but est de serrer nos programmes de près, de les suivre pas à pas et de doubler l’enseignement par une succession continue de tableaux ». (L’enseignement et les projections lumineuses – Revue pédagogique 1er sem.1884).
Dès lors cet incroyable succès autorise une production massive de films et de diapositives. En 1934, la collection des vues du Musée atteint le demi-million de vues. Le fonds de ses vues s’organise en 5 sections thématiques :
A – Histoire, beaux arts, littérature – B – Géographie, voyages – C – Sciences –histoire naturelle, physique, astronomie et météorologie – D – Sciences sociales : agriculture, horticulture et apiculture, machines, industrie, art militaire et marine – E –Divers : Conférences littéraires et expositions.
Certaines collections auront cependant la faveur des utilisateurs : la Révolution, la conquête de l’Algérie, l’expédition du Tonkin, la machine à vapeur de Denis Papin, les travaux des champs …
Bientôt, la projection lumineuse à vues fixes va devoir affronter un terrible concurrent, il s’agit du cinéma qui en moins de quinze ans va s’imposer lui aussi comme méthode d’enseignement. C’est une autre histoire…
Passionnante cette éclosion de l’audio-visuel et pour ceux qui souhaiteraient se « projeter » un peu plus avant dans cette affaire qu’ils aillent donc consulter l’article d’Armelle Sentilhes. L’audio-visuel au service de l’enseignement : projections lumineuses et cinéma scolaire, 1880-1940 in. La Gazette des archives n°173, 1996. Ce texte en est un court et modeste résumé.
Article proposé par Denis RENOUF