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lundi 11 novembre 2019

Recrutement des enseignants au XIXème siècle

Recrutement des enseignants

Il ne faut pas oublier que sous l’ancien régime le plus gros de l’instruction relève des congrégations religieuses ; or en les supprimant, la Révolution se trouva face à un problème extrêmement préoccupant : par qui remplacer les enseignants religieux ? et comment les former très vite ?

Avant de se focaliser sur ce point, regardons comment, en amont, l’enseignement est perçu à partir de la Révolution.

Le décret du 29 frimaire an II (19 décembre 1793) pose dans son article 1 un principe simple et clair : « l’enseignement est libre » et précise dans son article 2 qu’« il sera fait publiquement » ; nous avons ici les premiers prémices d’un service public.

Mais les parents ont toute latitude dans le choix de l’établissement qui instruira leurs enfants. A noter que les instituteurs étaient rémunérés à raison du nombre d’élèves fréquentant leur école.

Ce droit dans le libre choix est d’ailleurs réaffirmé par la Constitution de l’an III, « les citoyens ont le droit de former des établissements particuliers d’éducation et d’instruction ainsi que des sociétés libres pour concourir aux progrès des sciences des lettres et des arts ».


Cette liberté est malgré tout à double tranchant car les familles aisées ont la possibilité de créer une école privée dispensant un enseignement traditionnel préservant leur descendance des idées nouvelles issues de la Révolution.
C’est ainsi que le Directoire intervint en s’appuyant sur l’article 356 de la Constitution qui permettait à l’État de « surveiller les professions qui intéressent les mœurs publiques, la sûreté et la santé des citoyens ».
Conseiller de Foucroy
Antoine François de Foucroy
Un arrêté du 17 pluviôse an VI (5 mai 1796) ordonna donc aux administrations municipales de visiter une fois par mois les écoles particulières afin de vérifier « si les maîtres ont soin de mettre entre les mains de leurs élèves, comme base de la première instruction, les droits de l’homme, la constitution et les livres élémentaires qui ont été adoptés par la convention ».

Ceci étant il est difficile de contrer les habitudes et traditions : Fourcroy, conseiller d’état, écrit en effet à cette époque que « le défaut d’instruction sur la religion est le motif principal qui empêche d’envoyer leurs enfants à ces écoles. On préfère les envoyer chez des maîtres particuliers que l’on aime mieux payer parce qu’on espère y trouver une meilleure instruction, des mœurs plus pures et des principes de religion auxquels on tient beaucoup ».

La loi sur l’Instruction du 11 floréal an X (1er mai 1802) va trancher les choses de façon un peu simpliste : les petites écoles seront laissés sous le contrôle des communes car elles sont les mieux à mêmes de savoir ce qui est bon pour leurs paroissiens.
Loi du 11 floréal an X
Les instituteurs seront donc choisis par le maire, leur traitement sera composé du logement (à défaut leur sera versée une indemnité compensatrice) et d’une rétribution fournie par les parents et déterminée par les conseils municipaux. Les parents qui sont dans la gêne pourront en être exemptés.

Les instituteurs sont sous la coupe des communes… ce qui ne manquera pas d’impacter leur statut comme nous le verrons plus loin.

Il est manifeste que Napoléon se désintéresse de l’instruction du peuple : « le petit peuple les travailleurs des villes et des campagnes ne sont pas nés pour être instruits ; pour eux l’instruction est un luxe inutile voire dangereux car les lumières rendent le peuple raisonneur et critique et le détournent de l’atelier ou des champs ».
En revanche les établissements secondaires ont toute son attention puisqu’il limita dès le consulat ce régime de liberté : « il ne pourra être établi d’écoles secondaires sans l’autorisation du gouvernement ».
 

La loi du 10 mai 1806 quant à elle affirme qu’« il sera formé sous le nom d’Université impériale un corps chargé exclusivement de l’enseignement et de l’éducation publique dans tout l’empire » ; elle a ses ressources propres et s'administre elle-même sous l'autorité d'un grand maître.



 

Mais cette loi présente un certain nombre de lacunes et faiblesses très nettes :
  • L’enseignement primaire n’est pas concerné par cette loi et laissé aux mains des communes
  • L’instruction des filles est mis de côté : Napoléon ne pense pas qu’ « il faille s’occuper d’un régime d’instruction pour les jeunes filles ; elles ne peuvent être mieux élevées que par leur mère ; l’éducation publique ne leur convient pas puisqu’elles ne sont point appelées à vivre en public […] le mariage est toute leur destination »
  • La neutralité des programmes disparaît puisque « toutes les écoles de l’Université impériale prendront pour base de leur enseignement les préceptes de la religion catholique »
Le décret du 17 mars 1808 ajoute que « l’enseignement public dans tout l’empire est confié exclusivement à l’université. Aucune école, aucun établissement quelconque d’instruction ne peut être formé hors de l’université impériale et sans l’autorisation de son chef. Nul ne peut ouvrir d’école ni enseigner publiquement sans être membre de l’université impériale »

Enfin les articles 2 et 3 du règlement de l’université impériale du 17 septembre 1808 enfoncèrent le clou en précisant qu’ « à dater du 1er janvier 1809, l’enseignement public dans tout l’empire sera confié exclusivement à l’Université. Tout établissement quelconque d’instruction qui ne serait pas muni d’un diplôme exprès du grand maître cessera d’exister »

La Restauration conservera ce monopole d’état sur la formation des enseignants, l’élaboration des programmes et la délivrance des diplômes.

Quant à aux petites écoles, rien de nouveau puisque l'ordonnance du 29 février 1816 porte que chaque commune doit pourvoir à l'instruction primaire des enfants et ceci gratuitement pour les indigents. Un certificat de bonnes mœurs, un brevet de capacité et une autorisation rectorale sont imposés à tout instituteur tant public que privé. Dans les faits, les vérifications sont pour le moins inexistantes …Il faudra attendre la loi Guizot l’instruction primaire du 28 juin 1833 pour que cette obligation imposée aux communes devienne une réalité.

François Guizot
La Monarchie de Juillet fut assez hésitante sur la question d’autant plus que la charte de 1830 avait promis la liberté d’enseignement mais le monopole étatique fut maintenu.

Nous verrons dans un prochain article que la loi Guizot et celles qui suivirent vont également améliorer le sort des instituteurs quant à leurs appointements notamment mais vont aussi lui permettre de petit à petit prendre leur indépendance face au maire et au curé de la commune…

 Article issu du blog généalogique : http://magenealogie.eklablog.com/
Rédigé par Séverine Rose

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